samedi 18 décembre 2021

Angel Teruel

 


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   Avec Ruiz Miguel, Angel Teruel a été le premier torero que j'ai aimé. Rien de commun pourtant entre les deux. Si Francisco Ruiz Miguel a toujours fait partie du camp des belluaires, Angel Teruel, avec ses airs de petit marquis poudré était à mille lieu d'incarner l'idéal viril du dominateur de toros. Et pourtant, les Miuras de Madrid ou de Bilbao qu'il a combattus à plusieurs reprises ne lui faisaient pas peur ! Et surtout ne posaient aucun problème à sa maestria faite d'un mélange de froide intelligence, apanage des fins stratèges et d'un art sincère et subtil qui le rendait capable d'émouvoir aussi le public de la Maestranza.
   En 1967, à l'âge de 17 ans et après 18 novilladas piquées seulement, il prit l'alternative avec succès lors de la feria de Burgos. Il suivait en cela l'exemple de prestigieux prédécesseurs : Paco Camino et José Gomez "Joselito". Lorsque l'on fait preuve de capacités évidentes, point n'est besoin de s'attarder inutilement dans les rangs des novilleros : ce ne peut être que devant des toros que l'on apprend à toréer les toros !
   Au mitan des années soixante-dix, il fut durant quelques temporadas, le torero le plus intéressant et le plus régulier de l'escalafon. Sa froideur de technicien, son affectation furent alors transcendées par sa volonté de s'imposer à tous les toros, à tous les publics et à tous les toreros. Une fois cela acquis, il relâcha ses efforts et quitta les ruedos dans une relative indifférence.
   Le Madrilène était un torero de classe dont l'élégance pouvait parfois passer pour de la préciosité. Le voir traverser lentement le ruedo de son pas mesuré, port altier et lèvres pincées était en soi un spectacle ... que l'on acceptait car on savait qu'il y avait du fond derrière : une lidia précise et dominatrice, un toreo classique et sincère.



lundi 13 décembre 2021

Télévision (2)

   

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   La télévision a acquis aujourd'hui un rôle considérable dans l'économie de la fiesta brava, rôle encore accru à la suite de la crise provoquée par l'épidémie de coronavirus.
   Si la télévision publique nationale espagnole (RTVE) ne retransmet plus de corridas en direct et en intégralité qu'épisodiquement (la dernière remonte à 2016), son rôle a été remplacé dans cette fonction par certaines chaînes régionales et par la télévision payante. Les chaînes régionales (essentiellement castillanes et andalouses) retransmettent tout au long de la temporada de nombreuses courses, la plupart modestes aussi bien par le cartel que par les plazas concernées. La contribution financière versée par ces chaînes, même limitée, permet aux organisateurs de boucler leur budget et on sait que, depuis la crise sanitaire, ce financement a permis à l'activité taurine de se maintenir dans les régions concernées.
   La télévision payante est d'un tout autre niveau. Depuis maintenant plus de 10 ans, le réseau Movistar + (anciennement Canal +) possède une chaîne à péage exclusivement consacrée à la tauromachie qui diffuse en direct et avec des moyens techniques considérables les plus grandes ferias espagnoles. Aujourd'hui - et c'est une nouveauté pour les aficionados français - on peut s'y abonner depuis son ordinateur ou son téléphone portable par l'intermédiaire de la plateforme Plaza Toros TV.
   Lorsque la situation sera redevenue normale (si elle le redevient un jour), on peut dire que chaque aficionado sera en mesure de voir quasiment chaque jour de la temporada une corrida en direct sur un écran et en particulier les cartels les plus attractifs des plus grandes arènes. Le tout pour une somme ridicule en comparaison avec le prix d'un billet d'entrée, et sans être obligé de se déplacer, dans le confort de son univers quotidien.
   Il s'agit d'un changement considérable dans la manière de voir une corrida (dans la manière de consommer du spectacle taurin pourrait-on dire) et dans l'économie de la fiesta. Changement dont nous ne pouvons encore mesurer tous les effets, qu'ils soient positifs ou négatifs, même si certains sont déjà bien visibles, en particulier en Espagne où ce système est en place depuis plusieurs années.
   Sans chercher à rentrer dans une analyse détaillée, j'ai tenté de faire une liste des inconvénients qui me paraissent découler de cette situation.

     - moindre affluence aux arènes.
Toute corrida télévisée constitue une concurrence non seulement pour la corrida télévisée elle-même mais aussi à l'encontre de tout spectacle taurin qui se donne le même jour où que ce soit dans le monde.
En Espagne les personnes âgées ont déjà très largement déserté les gradins, préférant le confort et la sécurité de leur chez-soi. Qui plus est en période d'épidémie, et il semble que nous rentrions dans une époque d'épidémie chronique !

     - moins de convivialité et de relations sociales
On m'objectera qu'il y a les bars et les clubs taurins; mais bien souvent, ce sera seul devant son écran. Rien avant, rien après. Et sans la chaleur et la vibration du public.

     - baisse du niveau de l'aficion
Les commentateurs ont un esprit critique réduit au minimum et sont même parfois passés maîtres dans l'art de faire prendre les vessies pour des lanternes. Dans ces conditions, difficile de former une aficion entendue.

     - fin du plaisir de l'imagination
Il sera possible d'avoir tout vu : les plus grands combats, les toros de bandera, les plus belles faenas. Une banalisation de l'extraordinaire alors que les grands exploits ne sont jamais décevants lorsqu'ils sont imaginés (voire imaginaire).
Sans compter que c'en sera fini de la frustration de n'avoir pas vu une función ou un moment important. Or il n'y a pas de désir sans frustration : nous serons des aficionados blasés.

   Certes ces effets pervers sont compensés par la possibilité  pour les empresas, grâce à la manne financière qu'apporte la télévision, d'organiser leurs spectacles avec plus de facilité et en plus grand nombre. Que cette manne aille en partie dans la poche des sociétés de télévision, des toreros et ganaderos, des organisateurs, c'est la règle du jeu. Mais il faut aussi qu'elle profite directement aux spectateurs qui se rendent à la plaza en permettant une baisse des tarifs à la taquilla. Il parait logique aussi qu'en compensation du préjudice exercé contre les autres spectacles, une partie de cet argent soit utilisé pour assurer l'avenir de la tauromachie, en aidant par exemple les écoles taurines et en contribuant à l'organisation de novilladas.



NB : A la suite de la suppression de l'émission Signes du Toro, toujours pas de réactions. Ni de la part de F3, ni de la part des aficionados (voir Télévision 1).
 



vendredi 26 novembre 2021

Retour en image sur la corrida de Pedraza de Yeltes à Mont-de-Marsan

    L'une des meilleures corridas de la temporada 2021 dans le Sud Ouest a eu pour cadre les arènes du Plumaçon où, le dimanche 25 juillet, les diestros Lopez Chaves, Alberto Lamelas et Gomez del Pilar affrontaient six toros de Pedraza de Yeltes.
   C'est un vrai plaisir de revenir sur cette course grâce au photos de Laurent Bernède. Celles-ci ont la particularité d'avoir été prises depuis les gradins les plus hauts et, malgré cela ou peut-être grâce à cela, elles sont d'une grande qualité et pleines d'émotion. Hanter les callejons n'est peut-être pas la meilleure façon de réaliser de belles photos taurines !
 
 


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Cinq toros sur six ont fait preuve ce jour-là d'une grande bravoure. On voit ici le cinquième, Sombrilla, qui prit trois piques citées de plus en plus loin (piquero David Prados).







 

 

 

 

 

 

 

 

Toute la toreria de Domingo Lopez Chaves face à Jacobo, le quatrième. Classe et facilité dans un début à l'estribo; belle illustration du verbe se croiser (on notera les dégats du costume après une sérieuse cogida); naturelle en courant la main.

 

 

 















 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Alberto Lamelas fut le triomphateur du jour. Il fit preuve d'un engagement total durant toute la course et donna de magnifiques naturelles.

 

NB : Il faut, bien sûr, pour mieux les apprécier, cliquer sur les photos pour les agrandir.

jeudi 18 novembre 2021

Bilan 2021

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ma corrida rêvée

                        6  toros de LA QUINTA  6 
Morante de la PUEBLA - Daniel LUQUE - Emilio de JUSTO
 
 
   Grâce aux campagnes de vaccination en masse, la saison taurine a pu enfin réellement démarrer en juillet avant de devenir quasiment normale en septembre. Et pour que notre bonheur soit parfait trois matadors ont connu une temporada d'exception. 
 
   Morante, rayonnant, a marqué l'année de son empreinte. D'abord en choisissant de toréer, contrairement à son habitude, des toros d'encastes variés. Ensuite en laissant trace quasiment à chacune de ses sorties  du génie qui l'habite (on exceptera bien sûr l'échec de son solo contre les Prieto de la Cal). Nous ne sommes pas ici amateurs de chiffres mais il faut avouer que le voir à la tête de l'escalafon est une belle revanche pour tant de temporadas où cette position a été occupée par de médiocres toreros. Sa saison a été d'autant plus exemplaire que, s'étant éloigné des grands trusts taurins, il en a géré l'intendance de manière indépendante, simplement aidé par un ami. Notre vœu c'est bien sûr qu'il aborde l'année prochaine avec le même état d'esprit. Morante face aux Victorino Martin ou face aux Partido de Resina en 2022 : de quoi rêver pour l'hiver !
 
   Si le maestro de la Puebla a tant toréé et si la temporada a pu reprendre avec tant de vigueur c'est beaucoup parce que les toreros ont accepté une baisse de leur cachet. Ce serait le point positif qu'aurait apporté cette épidémie si cette baisse se prolongeait dans l'avenir. Et nous ne voyons pas pourquoi il en serait autrement compte tenu de la baisse régulière du nombre de spectateurs depuis quelques années, baisse que les récents évènements n'ont fait qu'accentuer, à tel point que les demi-aforos imposés par la crise sanitaire ont bien souvent servi de cache-misère. Les figures doivent se rendre à l'évidence : elles n'ont plus les moyens d'imposer des cachets pharaoniques aux organisateurs. Mais cela est vrai aussi pour les courses plus modestes que sont les corridas sans vedettes et les novilladas : sans réduction des coûts leur viabilité économique, donc leur avenir,  ne sont plus assurés.

   Mais revenons à ceux qui nous font rêver. Quelle belle histoire que celle d'Emilio de Justo ! Après les triomphes continus de cette temporada, dont ceux de Madrid et de Séville ne sont pas les moindres, le voici entré de plein droit dans la cour des grands. Et si Daniel Luque, victime de sorteos malheureux, n'a pu connaître la joie de la salida a hombros dans ces deux mêmes arènes, tant mieux pour nous, c'est l'assurance de le voir à nouveau à son meilleur niveau l'année prochaine.

   C'est sans doute la marque d'une grande naïveté de notre part d'avoir attendu beaucoup plus du comportement des toros au cours de cette temporada. Certes leur présentation fut en général excellente - et pour cause, il y avait pléthore de bêtes à cornes dans le campo - mais on pouvait penser que le nécessaire écrémage imposé aux ganaderos par la crise leur permettrait de nous réserver le meilleur de leur camada. Hélas ! les aficionados n'ont pu que constater une fois de plus à quel point le manque de caste fait des ravages chez la plupart des élevages commerciaux.

   Il faut imaginer 2022 sans masque, sans laissez-passer sanitaire, sans jauge réduite, mais il faut bien reconnaître qu'à ce jour ce n'est encore qu'un rêve.


photo : Morante devant un Miura à Seville
   

 
 
 
 
 
   


 

mercredi 27 octobre 2021

Deux films taurins : Nuestro tiempo et Dune

    Nous avions parlé en début d'année de l'indispensable livre de Guy Suire sur le cinéma et la tauromachie. Deux nouvelles œuvres cinématographiques d'importance sont sorties depuis.

Nuestro tiempo
 
   Ce film du cinéaste mexicain Carlos Reygadas retiendra l'attention des aficionados car il se déroule dans une ganaderia de l'État de Tlaxcala. On y voit de nombreuses scènes de campo qui dénotent la bonne connaissance du sujet par le réalisateur et même son aficion : vie des toros, tri, tienta a campo abierto. On y voit aussi le matador Sergio Flores s'entrainant. Pour rester dans le registre taurin, même si c'est plus anecdotique, lors d'une impressionnante séquence visuelle au cours de laquelle nous survolons la mégapole de Mexico, on reconnait la plaza de toros Monumental. Et le dernier mot du film revient aux toros : un violent combat les oppose qui se terminera par la mort de l'un d'eux. De fait, tout au long du film, le réalisateur met en correspondance ce qui relève de la nature, de l'instinct  et ce qui relève de la culture. Ainsi la magnifique première séquence durant laquelle des enfants jouent dans la boue d'un étang. Ainsi le sujet principal du film  qui montre un couple (les ganaderos) qui se délite lorsque l'attrait sexuel qui les unissait  se trouve remis en question. Le sujet est certes un peu convenu d'autant que ne manquent ni l'amant, ni le pacte d'infidélité entre époux. Mais le talent de Carlos Reygadas qui est l'un des meilleurs cinéastes mexicains actuels lui permet de donner, avec l'aide des toros, de l'intérêt à la situation.
   Pour terminer, il est nécessaire de préciser qu'il s'agit d'un film lent (3 heures) et d'une grande beauté formelle. Nuestro tiempo vient nous rappeler que notre temps n'est pas fait que de faciles séries de consommation courante, le cinéma qui prend son temps y tient encore sa place ... et les toros aussi.
 




Dune
   Ce n'est pas sans une pointe de satisfaction que les aficionados auront constaté que, dans son adaptation du chef-d'œuvre de science-fiction qu'est Dune, le cinéaste Denis Villeneuve a maintenu les références taurines que contenait l'œuvre originale de Frank Herbert.
   Le grand-père de Paul a en effet perdu la vie au cours d'un combat contre un taureau. C'est avec un grand respect pour cet ancêtre vertueux et exemplaire que, lors du départ pour la planète Arrakis, ses descendants font suivre la tête du taureau meurtrier ainsi qu'une sculpture et le portrait en torero de cet éminent membre de la famille Atréides. Ils continueront ainsi à orner la salle à manger du nouveau palais familial.
   La référence à la tauromachie parait logique si l'on rappelle que ce qui fonde le pouvoir des personnages principaux et notamment du héros Paul Atréides, c'est la maîtrise de soi, en particulier de sa peur, et la capacité à diriger, par sa force mentale, des puissances bien supérieures. En somme le fait d'agir en torero !


mercredi 20 octobre 2021

Aire-sur-l'Adour : novillada concours

 


Cette novillada concours aturine à l’alléchant cartel, initialement prévue le 1er mai, a bénéficié d’un temps magnifique mais a déçu par l’absence de novillo suffisamment complet pour remporter le prix.

   L’albaserrada de JOSE ESCOLAR est magnifiquement présenté mais il montre des signes de faiblesse. Trois piques malgré tout, la meilleure la dernière. A la muleta une charge réduite, de peligro sordo. Carlos Olsina est pris sèchement sur une tentative de naturelle et file sur ses propres pieds à l’infirmerie. Après intervention médicale, il en ressortira en fin de course pour lidier le dernier novillo.

   Artaban un burraco de YONNET arbore fièrement son armure, son absence de morillo le rend en revanche plus modeste. Il charge de loin au premier tiers pour deux piques en quatre rencontres (chiffres qui s’expliquent par la maladresse honnête du piquero) sans toutefois insister sous le châtiment. Il fait ensuite preuve d’une noblesse fade.

   Le buendía de FLOR DE JARA est bien roulé mais court d’armure. Il fait une sortie de manso puis prend trois piques sans se livrer. La muleta convaincante de Manuel Diosleguarde révèle sa noblesse.

  Avant l'arrastre de ce troisième novillo, l'émouvant recueillement au son du pasodoble Ivan Fandiño nous rappelle que les acteurs de ce spectacle extraordinaire qu'est la corrida se jouent le vie de verdad. On a trop souvent tendance à l'oublier.

   Ibarreño est un santacoloma léger de l’élevage craulenque de TURQUAY. Il remate aux tablas puis offre sur la première pique la meilleure poussée de l’après-midi, hélas ! il en sortira exsangue, comme annihilé par l’effort accompli. La deuxième pique ne sera qu’une formalité mais le petit novillo reprend des couleurs au troisième tiers où il aurait mérité un autre traitement que celui offert par Montero.

   Le pedrajas de L’ASTARAC est bien en chair mais sa motricité laisse à désirer, ce qui l’empêche sans doute de donner toute sa mesure. Il a la chance de tomber entre les douces mains de Diosleguarde qui le fera repartir au desolladero une oreille en moins.

   Le pupille du rare élevage AGUSTINEZ (croisement Veragua-Santa Coloma) a été décalé en sixième position afin de permettre à Carlos Olsina, sortant de l’infirmerie après opération, de le lidier. Le novillo fait illusion à sa sortie et permet au Biterrois une belle réception par véroniques et rebolera. Mais le novillo tire vite le rideau : deux piques anodines et plus de charge au troisième tiers.

   Chez les novilleros Manuel DIOSLEGUARDE (salut, une oreille) a fait excellente impression. Son toreo classique, élégant, efficace lui donne quelques atouts dans la perspective d’un passage au niveau supérieur.

   Carlos OLSINA est encore très vert et très maladroit. Son retour en piste après blessure et intervention chirurgicale plaide en sa faveur.

   Malgré une oreille (de peu de poids), MONTERO a confirmé ce jour sa mauvaise temporada.

   Cette novillada a connu peu de réussite mais la formule du concours a permis d’en maintenir l’intérêt jusqu’au bout.


lundi 4 octobre 2021

Parentis-en-Born (2)

 



 




















Samedi 2 octobre 2021    Parentis    nouvelles arènes Roland Portalier
temps couvert et doux
trois quarts d'arène
 
Six novillos de Los Maños (12 piques, inégaux) pour Manuel Diosleguarde (applaudissement, une oreille), Miguel Aguilar (silence, une oreille) et Cristian Parejo (une oreille, vuelta).

La commune de Parentis a cassé sa tirelire pour rénover les arènes Roland Portalier. Une tirelire qui devait être bien garnie car Parentis ce sont les uniques puits de pétrole français, sans compter les industries chimiques (fabrication du précieux charbon actif) que l'on aperçoit sur la photo 2, ainsi que le tourisme. En tous cas, les architectes s'en sont donné à cœur joie pour couvrir l'édifice d'un manteau blanc et rendre son accès plus facile. Comme toujours dans le cas des arènes couvertes, le problème vient de l'acoustique, extrêmement désagréable.
Le public avait répondu présent et l'animation qui régnait autour des arènes avant et après la course semblait vouloir tirer un trait sur deux années privées de toute convivialité.
Les santacolomas aragonais  de Los Maños, correctement présentés à l'exception du petit second, constituèrent un lot intéressant mais sans toro complet. Le meilleur pour le torero, le tambour major, d'une grande franchise à la muleta. A la pique, le dernier offrit un beau combat en trois rencontres citées de loin mais il se réserva au troisième tiers. Tous eurent le défaut de manquer de fixité sur les leurres, ce fut particulièrement notable au moment de la mise à mort. Peut-être la conséquence de l'éclairage électrique.
Manuel Diosleguarde aurait dû couper les oreilles du facile premier. Il le toréa avec aisance et fluidité mais trop superficiellement pour emporter l'adhésion totale des étagères. Il tua en outre de manière défectueuse en deux temps. Même aisance avec le quatrième avant un final plus heurté. Oreille après une entière trasera efficace.
Face à deux adversaires qui posaient des problèmes, le Mexicain Miguel Aguilar fit toujours preuve de vaillance et de sincérité. Il fut souvent mis en difficulté par le cinquième, un âpre manso con casta, mais son opiniâtreté et une estocade contraire engagée lui permirent de couper l'oreille.
Cristian Parejo m'a paru très torero. Une chose difficile à définir mais que l'on sent à sa manière d'être face au toro et de transmettre un supplément d'émotion au public. Face à des novillos qui avaient tendance à sortir de suerte la tête haute, il eut du mal avec le troisième temps de ses passes. Mais il donna d'excellents pechos, très toréés, qui lui permirent de terminer somptueusement ses séries.
Sans connaitre de hauts faits d'armes, cette novillada inaugurale des nouvelles arènes résulta entretenida.


dimanche 19 septembre 2021

Chasse

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   La journée de manifestations des chasseurs a été un franc succès. Même la presse parisienne, semblant découvrir la lune, en a parlé. La journée a marqué les esprits ... et a sans doute fait frémir de rage bon nombre d'animalo-écolos. A neuf mois des présidentielles, elle était parfaitement bien placée pour rappeler aux candidats le poids du vote du monde rural, un monde trop souvent méprisé par les élites citadines. Bonne idée aussi que ces gilets oranges qui sonnaient comme un avertissement.
   C'est au nom de la culture, de la culture humaniste qu'il faut défendre la chasse aussi bien que la tauromachie comme le rappellent avec justesse Francis Wolff dans Sud Ouest dimanche  et Pierre Vidal dans son éditorial sur Corrida Si.
 

Photo : Laurent Teilhet Sud Ouest
 

mercredi 15 septembre 2021

Peralta

 



 















Samedi 11 septembre    Peralta (Navarre)   Plaza de toros municipal
beau temps
faible entrée

Six novillos de Santafé Marton (6 piques, inégaux) pour Daniel de la Fuente (une oreille, une oreille), Jorge Martinez (salut, salut) et Manuel Perera (deux oreilles, une oreille).

Contrairement à la Castille qui a vu à partir du mois d'août une reprise foisonnante des activités taurines, la Navarre, pourtant terre taurine de tradition, est restée beaucoup plus discrète. On peut penser que la rigidité des autorités régionales n'a pas aidé à la reconstruction. Dans la plaza de Peralta un cerbère de la police navarraise piste ceux qui ont osé tomber le masque et les oblige à le remettre sous peine d'exclusion.
Les novillos de Santafé Marton, d'origine domecq, sont élevés à quelques encablures de Peralta. Ils sont bien connus dans le Sud-Ouest. On les y voyait fréquemment en novilladas non piquées avant que les élevages français, par leur qualité, ne les supplantent. Le lot du jour est correctement présenté. Une mobilité meuglante et parfois désordonnée leur permet de surmonter une faiblesse latente. A l'exception du 2, invalide et du 6 que la faiblesse conduit à se réserver, ils permettent aux novilleros de s'exprimer.
Daniel de la Fuente, natif de La Puebla comme un certain Morante, semble toréer pour son plaisir. Il est débordé par la mobilité du premier qui touche sans cesse sa muleta mais réussit à se centrer avec le 4 qu'il torée avec une élégance distanciée.
Le Murciano Jorge Martinez, passé par l'école taurine d'Almeria, est précédé d'une réputation flatteuse pour avoir gagné, cette année, le concours de novilladas piquées andalouses. Il ne peut rien face à l'invalide second mais nous régale au cinquième novillo d'une faena classique composée essentiellement d'excellentes séries de naturelles terminées par des pechos de piton a rabo. Il lui reste encore à apprendre à tuer.
Manuel Perera arrive diminué d'une novillada matinale à Molledo, Cantabrie où il s'est fait prendre durement. Il torée sans chaquetilla et en pantalon vaquero et marche avec difficulté. Malgré cela, il se livre à fond et nous offre une tarde complète. La liste des qualités dont il a fait preuve ce jour est impressionnante : dynamisme, répertoire large aussi bien à la cape qu'à la muleta, bonne technique, souplesse et sens du rythme, matador efficace et engagé. Tout cela expliquant largement sa première place actuelle à l'escalafon des novilleros. On ne peut que souhaiter qu'il ne perde ni son entrega ni sa fraîcheur. L'art taurin a besoin de toreros dans son style.

mardi 14 septembre 2021

Villaseca de la Sagra

 
 


 



 

















 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Vendredi 10 septembre 2021    Villaseca de la Sagra (Tolède)  Plaza de toros La Sagra
très beau temps
deux tiers d'arène

Six novillos de Baltasar Iban (8 piques, muy encastados, vuelta au 2 et au 3) pour Ignacio Olmos (silence, salut), Victor Hernandez (salut, silence) et Isaac Fonseca (deux oreilles, palmas).

Les novillos de Baltasar Iban ont mis le feu aux arènes de Villaseca de la Sagra. Quelle caste ! Quelle bravoure ! Une novillada sans le moindre temps mort qui a captivé le public de bout en bout. Un regret : qu'un président, sans doute ennemi du tercio de piques, en changeant plusieurs fois prématurément le tiers, n'ait pas laissé la possibilité aux novillos d'exprimer pleinement leur bravoure face aux picadors. A la muleta, des charges codiciosas et répétées qui transmettent l'émotion nécessaire au spectacle de la corrida. Et lorsqu'ils touchaient la muleta, des coups de tête violents mais qui jamais ne les conduisaient à se réserver. Le deuxième Arbolario, poussant magnifiquement à la pique puis d'un allant inépuisable, et le troisième Fusilito, de grand tempérament, accomplirent un tour de piste post-mortem, de même que le mayoral à la fin de la course.
Pour les novilleros la tâche était ardue car ils se retrouvèrent face à des adversaires qui permettaient beaucoup mais pardonnaient peu.
Le Tolédan Ignacio Olmos a peu toréé bien qu'il ne soit plus un débutant. Il fut complètement débordé par la caste du premier mais réussit au quatrième quelques bons passages de toreo classique.
Victor Hernandez n'a jamais baissé les bras mais il a fini l'après-midi hébété, sans avoir jamais pu réellement prendre le dessus sur ses novillos.
Avec le Mexicain Isaac Fonseca ce fut tempérament contre tempérament. Faena d'émotion et de transmission au 3, débutée à genoux (arrucina incluse) et poursuivie par de belles naturelles. Bernardinas sans l'épée pour finir et estocade entière. Deux oreilles. Ce fut plus irrégulier face au dernier, le seul qui se réserva un peu.
Au final salida a hombros de Fonseca et tour de piste du mayoral, juste conclusion d'une tarde d'une vibration (hélas) inaccoutumée. Que reviennent plus souvent les Baltasar Iban !

lundi 13 septembre 2021

Albacete

 





 



 

 

 

 

 

 

 

Jeudi 9 septembre 2021      Albacete 
beau temps
demi-arène (trois quarts autorisés)

Six toros de Victoriano del Rio (7 piques et 1 chute, encastés) pour Diego Urdiales (salut, silence), Miguel Angel Perera (salut, une oreille) et Gines Marin (salut, salut).
 
Au pays de la coutellerie, outre l'importante feria taurine, les festivités en l'honneur de la Virgen de los Llanos comprennent une immense fête foraine et une exposition artisanale dans le Recinto Ferial. Le tout à deux pas de la plaza de toros. Cette année la fête foraine bat son plein mais les centaines de stands de l'exposition sont restés vides.
Avec la crise du coronavirus, la foi envers la protection attribuée aux innombrables vierges espagnoles semble connaître elle aussi une crise. Pour preuve, l'apparition d'un nouveau gri-gri, le masque, qui est porté avec assiduité par la population, dans la rue comme à la plaza de toros.
Les toros cinqueños de Victoriano del Rio sont bien présentés. Aucun n'est réellement brave mais tous possèdent un fond de caste qui permet un après-midi sans ennui.
L'actuation de Diego Urdiales est en demi-teinte. Le Riojano reste toujours maître de la situation mais sans vraiment chercher à imposer son toreo face à deux toros broncos.
Miguel Angel Perera est l'auteur d'une faena complète à son premier adversaire. Après un début avec des cites de loin, il raccourcit les distances au fur et à mesure qu'il établit sa domination sur le toro pour finir par une séance de toreo de proximité qu'il affectionne. L'échec à la mort le prive d'un succès important. Bonne faena encore à l'imposant cinquième qu'il torée avec temple et sitio. Oreille.
Gines Marin fera preuve durant toute la soirée d'une activité notable, tant à la cape qu'à la muleta, à la recherche d'un succès qui ne viendra pas en raison de ses échecs répétés avec les armes tauricides. Face au troisième, un manso puissant auteur d'un batacazo, il se croise et finit par imposer sa domination au rétif bicho. Faena variée et pleine d'entrega au dernier mais nouvel échec à la mort qui le prive de récompense.


 

dimanche 12 septembre 2021

Retrouver l'Espagne

 
   Après deux ans d'absence, retrouver l'Espagne est un vrai plaisir. Les odeurs sont parfois âcres. Les paysages de septembre, après trois mois d'été torride, sont désolés. Mais au fur et à mesure que l'après-midi s'avance, une agitation gagne le tour de la plaza de toros, la rumeur enfle, elle devient brouhaha. On peut fermer les yeux : on sait que l'on est en Espagne. Bientôt, sur le sable de l'arène, un homme vêtu de lumière affrontera le noir toro d'Espagne. Tout peut recommencer.    
   Un changement pourtant : la majorité des personnes que l'on croise porte un masque sur le visage. Inutile en revanche d'exhiber à tout moment un laissez-passer sanitaire, le concept, ici, n'a pas cours. A chacun ses us et coutumes.
   Notre périple devait commencer à El Casar dans la province de Guadalajara pour une corrida de Victorino Martin. A notre arrivée, la taquilla affiche victorieusement ''Entradas agotadas". Un panneau qui réjouit l'aficionado ... sauf lorsqu'il en est la victime. Il faut sans tarder mettre en place le plan B et filer dare-dare à Albacete qui se trouve à trois heures d'autoroute. On y donne la première corrida de la feria.
   Nous arrivons à temps pour honorer d'une minute de silence le maestro Pedres, l'un des meilleurs toreros albaceteño, décédé la veille. Le lot de Fuente Ymbro est magnifique (tous ont cinq ans bien sonnés) mais manso décasté. Finito de Cordoba entend une belle bronca à son premier. Daniel Luque torée avec professionnalisme et Juan Leal, dans son style, montre de l'assurance dans deux faenas adaptées au comportement querencioso de ses toros.
 

 




















   Albacete est une ville étrange. Comme mise à l'écart, oubliée. Lorsqu'une manne céleste a fait pleuvoir charmes et richesses sur l'Espagne bien peu de choses sont tombées sur elle.

jeudi 19 août 2021

A propos de la novillada de Roquefort

   L'élevage La Quinta se trouve actuellement à un niveau qui satisfait tous les aficionados.
   Les toristes parce qu'ils permettent d'authentiques tercios de piques. Le troisième partit trois fois à l'assaut du picador avec alegria et placé chaque fois plus loin. Ce fut, grâce au talent du jeune picador Alberto Sandoval, l'occasion de ce qui sera sans doute l'un des plus beau tercio de pique de la temporada dans la région. L'imposant et poderoso cinquième en prit quant à lui quatre en renversant deux fois la cavalerie.
   Les toreristes (et donc les toreros et aussi le grand public) parce qu'ils permettent le toreo moderne. Sur les huit novillos combattus (en comptant les deux de la non piquée matinale) cinq ont chargé les muletas avec une noblesse, une longueur de charge, une vivacité qui, de plus, allaient en augmentant lorsqu'ils étaient bien toréés.
   La bonne surprise fut que trois novilleros du jour, malgré leur peu de pratique, parvinrent, au moins par intermittence, à tirer profit de ces charges. Le matin Victor Barroso donna le ton en réussissant à lier de longues séries de derechazos. L'après-midi, Carlos Olsina s'imposa au cinquième par une extraordinaire série de droitières qui happa le novillo dans une ronde qui paraissait sans fin. Mais celui qui se montra le plus complet fut Yon Lamothe. Le jeune Landais, qui toréait sa première novillada de la temporada, domina jusqu'au bout ses deux adversaires, il parvint à donner de belles naturelles classiques et tua magnifiquement. Une révélation !
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
derechazo de Carlos Olsina 

















naturelle de Yon Lamothe


photos de Laurent Bernède
 

 

mercredi 11 août 2021

Roquefort il y a 70 ans, resenã de la novillada du 12 août 1951

  

  Parue dans le numéro 429 du 19 août 1951 de la revue Toros :

 




























   Il existe un film de cette novillada. On y voit Pepe Luis Marca, alors totalement inconnu, faire preuve d'une vaillance un peu désespérée. Il est souvent en difficulté et parfois ridicule, notamment lorsqu'il se fait charger lors d'un desplante à genoux tournant le dos au novillo. L'Aragonais, qui fut également ganadero, gagnera argent et célébrité hors de l'albero en devenant dans les années 80 apoderado puis beau-père de Paco Ojeda.
   Les frères Carlos et Paco Corpas devinrent tous deux matadors d'alternative, respectivement en 1954 et 1956. Sans grand succès pour Carlos, mais Paco sera durant quelques temporadas un honorable matador de deuxième file. Il eut ensuite un rôle important dans la défense des toreros en négociant leurs droits à la sécurité sociale.
 



vendredi 30 juillet 2021

Novillada de La Quinta à Roquefort pour le 15 août

 


 

   Cela fait 70 ans qu'ont été inaugurées les arènes de Roquefort. L'affiche de cette année reproduit celle de 1951 qui annonçait une novillada sans picadors avec des novillos de Lescot pour Pepe Luis Marca (futur apoderado de Paco Ojeda), les frères Carlos et Paco Corpas et l'éleveur Christian Lescot comme rejoneador. 
   Un point commun peut être trouvé entre les deux cartels. La présence en 2021 de deux novillos de Turquay qui sont élevés à quelques encablures de la ganaderia Lescot (aujourd'hui manade de taureaux camarguais) sise à Saintmartin-de-Crau. Les novillos santacolomeños d' Emmanuel Turquay auront la lourde responsabilité de partager l'affiche lors de la novillada non piquée matinale avec deux novillos de La Quinta qui représente aujourd'hui le meilleur de l'encaste santa coloma.
   L'après-midi la novillada piquée verra, en toute logique, le retour des La Quinta qui avaient donné pleine satisfaction en 2019.

   En voici deux exemplaires :
 




mardi 27 juillet 2021

Mont-de-Marsan : Madeleine 2021

    


   
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   Comme les bons toros, cette feria est allée a mas pour se terminer par l'apothéose de la corrida de Pedraza de Yeltes.
   Après Vic, elle a eu aussi le mérite de montrer qu'une feria taurine pouvait exister sans le secours d'une feria populaire, rappelant ainsi à ceux qui auraient tendance à l'oublier que la fête taurine est constitutive de toutes nos ferias.


Les toros
 
   La présentation des toros a été supérieure à celle de l'année 2019, elle a bénéficié de l'offre pléthorique qui existe actuellement dans tous les élevages en raison du nombre réduit de corridas.
 
   Les Jandilla, cinqueños, aux armures longues et astifinas, sans graisse superflue, constituaient un lot magnifique. Malheureusement le ramage ne correspondit en aucune manière au plumage. D'abord en raison de leur faiblesse : le 1 est faiblissime puis les 2 et 2 bis doivent être renvoyés au corral pour invalidité. Après ce préambule catastrophique on était peu enclin à apprécier la mauvaise caste des suivants qui se traduisit par des charges brusques et sans fixité.

   Très bien présentés aussi les Alcurrucén, avec leur typique corps ensellé. Ils firent des sorties timides puis sautèrent dans les capes qu'on leur présentait, enfin se montrèrent plus bravucones que braves au cheval en une quinzaine de piques et décevants à la muleta où ils finirent souvent sosos, de demi-charge. Le premier fut le plus intéressant. Imposant et puissant, il fut châtié durement trois fois avant de prendre deux rations supplémentaires au réserve (bronca). Le cinquième, pas totalement exploité, se montra très noble au troisième tiers mais avec de la fadeur.

   Comme toujours on attendait beaucoup des Adolfo Martin. Et l'on fut déçu. De présentation honorable mais discrète, le lot se montra bravito au premier tiers (12 rencontres), partant sans rechigner vers le cheval mais y poussant peu. Leur caractéristique fut ensuite la sosería, avec pour les 2 et 3 une innocente noblesse et un dernier toro suffisamment mobile pour permettre un final triomphal. En somme le lot torériste de la feria.

   Changement de décor avec le grand lot de toros de Pedraza de Yeltes le dernier jour qui, pour leur présentation au Plumaçon, permirent une tarde d'une telle intensité qu'elle restera dans le souvenir de tous les spectateurs. Tout avait pourtant mal commencé avec le premier, un grand bœuf qui laissa présager le pire. Mais les quatre suivants furent très proches du toro idéal dont rêve chaque aficionado. Imposants de charpente, irréprochables d'armures (terrifique le 5). Et braves. S'élançant avec franchise vers les canassons, ils poussèrent avec ténacité, arc-boutés sur leurs pattes arrières. Trois fois les 3 et 5, placés à chaque rencontre plus loin du cheval. Un bémol ? Oui, celui de n'avoir jamais renversé les chevaux. Mais la fête se poursuivit au troisième tiers car tous chargèrent le drap rouge sans hésiter, avec une grande noblesse le 2 et le 5 (vuelta al ruedo à chacun), avec plus d'âpreté les 3 et 4. Et tous résistèrent à la mort bouche cousue. Le 6, seul noir du lot, sera un ton en-dessous. Vuelta triomphale finale du mayoral en compagnie d'Alberto Lamelas dans une grande ferveur populaire.

Les matadors
 
   Miguel Angel Perera fit preuve de maîtrise technique en dominant deux toros différents, l'un faible, l'autre de mala casta. L'épée est toujours son point faible, mais il a justifié pleinement sa présence en remplacement du néo-retraité Enrique Ponce.
 
   Daniel Luque a lui aussi dominé deux mauvais toros et a mal tué. Très beau début de faena au réserve d'Antonio Bañuelos dont il accompagnera ensuite les fuites continuelles avec un grand sens de l'esthétique.
 
   Rude journée pour le local Thomas Dufau, honoré en piste en début de corrida à l'occasion des 10 ans d'alternative prise en ces mêmes arènes. On l'imagine rêvant, en guise de cadeau, de jandillas au sang bleu et donc à la noblesse avenante. Il en fut tout autrement. L'encasté troisième le contraint à rester sur la défensive, puis le dernier de la tarde lui met par deux fois la corne dans le ventre, la première fois sans sommation. Le corps endolori mais miraculeusement indemne, le Landais joue alors la carte du courage qui aurait pu lui valoir des lauriers sans un échec à la mort. 

   Face aux Alcurrucén, Diego Urdiales fut le seul matador de la terna à connaitre le succès. Une sereine maturité semble l'habiter et son toreo artistique, con empaque, toujours adapté aux conditions du toro reçut un accueil chaleureux du bon public montois. Il coupa l'oreille du quatrième après un pinchazo et une bonne entière pour une faena d'art subtil à un toro médiocre.

   Paco Ureña a connu une matinée discrète. Son premier adversaire avait des charges violentes, brusques, désordonnées et personne ne lui en voulut de ne pas s'arrimer. En revanche un torero de sa classe est capable de tirer parti mieux qu'il ne le fit de la noblesse fade du cinquième.

   Emilio de Justo, face à deux toros de charge réduite, joua excessivement de la voix et d'une vaillance un peu vaine. Il est des jours où il faut savoir ne pas triompher.

   Le one-man-show d'Antonio Ferrera face aux Adolfo Martin a été une grande réussite. Tout semblait parfaitement orchestré : déjà deux oreilles coupées à la mort du troisième et deux nouvelles oreilles au dernier qui se prêta parfaitement au jeu dans une ambiance survoltée. J'ai personnellement beaucoup aimé la mise en suerte systématique des toros à la pique depuis l'autre bout de la piste. Une innovation du maestro qui prête à débat et sur laquelle il faudra revenir. J'ai beaucoup aimé aussi sa manière de tuer à deux occasions par ce que l'on pourrait appeler un recibir al encuentro, le torero marchant vers le toro fixé à une quinzaine de mètres. Autre innovation d'une puissance émotive extraordinaire.
   Ce que l'on pourra en revanche reprocher au torero c'est son jeu de cape limité et très mobile ce jour ainsi que des faenas, certes en recherche de pureté, mais taillées sur le même patron. 
   Il faut enfin souligner qu'il piqua remarquablement le sixième portant le public au rouge vif et préparant ainsi l'apothéose finale d'une tarde qui fut un vrai évènement parfaitement géré par le professionnalisme du maestro.

   Chef de lidia pour la soirée des pedrazas, Lopez Chaves connut une journée accidentée. Il n'y avait rien à tirer du premier, le seul manso de la journée. Il fut pris violemment par le quatrième en début de faena, heureusement sans autre dégât que vestimentaire. Face à un animal à la charge soutenue et brusque, Domingo reprit peu à peu l'ascendant en un combat émouvant. Chaude vuelta après échec à la mort.

   Gomez del Pilar, en demi-teinte, connut de bons moments à chacun de ses coriaces adversaires mais sans jamais parvenir à s'imposer totalement.

   Admirable Alberto Lamelas, venu dans la ''capitale landaise'' pour triompher quoi qu'il en coûte et qui, aujourd'hui, connut un sorteo favorable (deux toros de vuelta) et sut en profiter. Il accueillit chacun de ses adversaires par une larga a puerta gayola puis s'attacha à construire des faenas classiques et dominatrices où se côtoyèrent des moments de grande limpidité tel un magnifique changement de main et d'autres plus accrochés. Grosse frayeur lorsque l'impressionnant cinquième le renversa et le chercha longuement au sol avec ses dagues suraigües sans autre dommage là encore que vestimentaire. Estoconazo au 2 et entière desprendida au 5 avec oreille chaque fois et émouvant triomphe.

   Ainsi se termina, par une corrida de verdad, cette feria atypique où les extérieurs de la plaza semblaient sinistrés par on ne sait quelle calamité, mais où le public, à l'intérieur, avait gardé intacte la flamme de l'aficion.



  
   
  

mardi 20 juillet 2021

Tyrosse

 

 



 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Dimanche 18 juillet 2021       Tyrosse      arènes Marcel Dangou
très beau temps     
entrée covid avec laissez-passer sanitaire 

Six toros de Pagès-Mailhan (7 piques, nobles, encastés) pour Thomas Dufau (salut, deux oreilles), Sergio Flores (deux oreilles, salut) et Joaquin Galdos (une oreille, deux oreilles).

Les arènes de Saintvincent-de-Tyrosse (Semisens en gascon) sont joliment décorées par des ferronneries réalisées par l'artiste Jean Ducasse. Malgré l'annulation des fêtes, une corrida avait été organisée et ce fut une de ces rares tardes où la combativité des toros, la qualité du travail des toreros, l'efficacité des estocades se conjuguent pour la plus grande joie du public.
La mort prématurée de Philippe Pagès (on célébra sa mémoire par une minute d'applaudissements) ne lui aura hélas pas permis d'assister au combat plein d'alegria des toros qu'il avait contribué à élever. Tous sortirent avec la fougue de ceux qui veulent en découdre et cognèrent dur contre les planches. C'est en général un signe de qualité que confirma la suite de leurs peleas, en particulier au troisième tiers où leurs charges vives, longues, plongeant dans les muletas avec avidité, permirent aux hommes de donner le meilleur d'eux-mêmes. Plus réservé le tambour major et dur, bronco l'imposant cinquième.
Après l'avoir accueilli par deux largas de rodilla au fil des barrières et donné au quite des chicuelinas serrées, Thomas Dufau sut parfaitement s'accorder avec le quatrième en une très bonne faena classique dans sa première partie, suivie de luquesinas et de manoletinas. Estocade entière et deux oreilles.
Dès les doblones initiaux, Sergio Flores affirma son ascendant sur la charge du 2. Maîtrise qui ne cessa plus dans une faena complète et variée. Une entière et deux oreilles. Il confirma ses qualités de dominio face au plus compliqué cinquième en réussissant à lui extorquer, par la vertu du toreo croisé, de méritoires droitières.
Joaquin Galdos fut parfois débordé par la codicia du troisième dont la bravoure aurait mérité d'être mise en valeur (et tempérée) par une deuxième pique. Il comprit la leçon au 6 qu'il plaça à distance pour une deuxième rencontre. Très bonne faena du Péruvien, classique, précise, qui cette fois s'accouple parfaitement avec son adversaire, les deux allant a mas en de magnifiques séries de naturelles et de derechazos. Très belle estocade finale (deux oreilles) qui conclut parfaitement une tarde triomphale.
À la sortie, des visages heureux.

mercredi 14 juillet 2021

Vic Fezensac 2021 (suite)


 




   La journée de dimanche a connu des moments de grande qualité, de ces moments rares et précieux que nous offre la tauromachie lorsqu’une rencontre a lieu entre un toro sérieux et un torero en pleine possession de ses moyens.

 

Corrida de Hoyo de la Gitana

   Bonne surprise que cette corrida de Hoyo de la Gitana, d’un trapio imposant, sérieuse, brave (14 piques), avec un bémol : une faiblesse de pattes latente qui empêcha certains toros de donner toute leur mesure et obligea à changer les 6 et 6 bis en raison de problèmes locomoteurs.

   Ce jour, Lopez Chaves connut une grande tarde, proche de la perfection. La lidia de son premier Hoyo de la Gitana constitua un modèle du genre. Tout ce qu’il fit à ce toro âpre fut précis, adapté, efficace. Pas un geste de trop, pas une passe superflue, une faena courte, pour une domination totale sur un toro qui ne demandait qu’à extérioriser sa caste austère. Une leçon de maître. Une oreille après une demi-estocade. Le Salmantin récidiva face au quatrième, plus avenant. Son sitio parfait, ses naturelles profondes soulevèrent l’enthousiasme du public qui l’obligea à accomplir deux tours de piste après une mise à mort laborieuse qui le priva de tout trophée. Grande journée de Lopez Chaves qui restera dans la mémoire de tous les aficionados présents.

   Avec un toreo beaucoup plus superficiel, Manuel Escribano fit appel à son expérience et à la variété de son jeu pour passer la rampe (salut, silence).

   Adepte d’un toreo répétitif et en ligne, Miguel Angel Pacheco passa totalement inaperçu.

 

Corrida de José Escolar Gil

   Il y a des corridas qui, comme les bons toros, vont a mas, ce fut le cas de celle-ci commencée dans la fadeur et l’ennui et terminée par un grand triomphe.

   Le petit ruedo vicois avait bénéficié pour l’occasion d’un lot d’une présentation supérieure qui en temps normal aurait été lidié à Madrid ou Pampelune. Mais les arènes de Las Ventas tournent au ralenti et, en cette semaine de San Fermin, les rues de la capitale navarraise restent désespérément désertes.

   Les quatre premiers Escolar Gil ne refusent pas l’appel des picadors (3 piques chacun)  mais pêchent par leur fadeur au point de permettre la sieste habituelle des jours sans toros. Il faut dire que de leur côté les toreros n’aident pas.

    Octavio Chacon est loin de son niveau d’il y a quelques années, on le sent usé prématurément par les rudes combats qu’il a déjà mené. Il laisse échapper les possibilités qu’offre, en particulier à gauche, son second adversaire.

   Manchero, le cinquième, est un magnifique cardeno. Il prend trois piques en poussant de verdad puis fait preuve d’une belle noblesse bien qu’entachée elle aussi de soseria. Alberto Lamelas n’est pas l’homme de la situation. Sans sitio, destemplado, le vaillant batailleur qu'il est ne peut en tirer profit malgré l’appui des tendidos qui l’avaient affectueusement appelé à saluer en début de corrida en souvenir de ses exploits accomplis en ce même ruedo.

   Jusqu’à ce moment, on peut dire que l’après-midi est un échec aussi pour les toreros qui n’ont jamais su prendre la mesure de toros à contrestyle de ce cartel de guerriers.

   Mais sort Cantador, plus petit malgré ses cinq ans bien sonnés, qui va changer la donne. Trois piques prises en brave pour lui aussi mais il possède en outre le nerf, la codicia, l’alegria qui manquaient à ses frères et qui vont donner du relief à ses charges répétées durant le troisième tiers. Gomez del Pilar saura profiter de ce remarquable adversaire, en particulier dans d’énormes séries de naturelles qui feront lever le public. Il arrête judicieusement la faena après un léger accrochage sans laisser au toro le temps de reprendre le dessus. Une entière, résistance du toro, deux oreilles pour Gomez del Pilar et vuelta pour Cantador. Final heureux d’une feria plus que jamais indispensable.