dimanche 31 août 2008

Bayonne : des Palha de premier tiers

Il y avait dans ce lot de PALHA à la fois une plénitude et un manque. Plénitude qui venait en premier lieu de leur trapío parfait. Des toros profonds et harmonieux, les deux derniers de véritables estampes. Il y eut ensuite leur combat face aux picadors. Tous livrèrent au premier tiers des assauts acharnés, poussant avec codicia et ténacité. S'ils ne prirent que douze piques (une chute) c'est que leur obstination face au peto leur valut un châtiment sévère. La palme revint au second qui poussa durant de longues minutes, faisant parcourir au cheval plus de la moitié de la circonférence du ruedo, sans qu'il soit possible de le séparer de sa proie!
C'est face à la muleta que se révéla leur incomplétude : des toros parados, des charges souvent réduites à de violents et désordonnés coups de tête. Avec le sentiment, pour le public, de quelque chose d'inachevé. Comme un vin qui séduirait par sa robe, épaterait par son bouquet, avant de tourner court en bouche, sur une pointe d'aigreur, laissant le dégustateur avec une étrange et frustrante impression d'anomalie.
Il faut rendre hommage à tous les toreros qui affrontèrent ce dur bétail. Matadors, banderilleros et picadors firent tous preuve d'un professionnalisme qui évita que la course ne tourne à ce qui aurait pu être une débandade.
RAFAELILLO hérita des deux toros qui avaient le plus de recorrido. Ceux dont on pouvait éventuellement tirer le plus de parti, mais aussi les plus dangereux car ils serraient sur l'homme, faisaient mine d'humilier avant de balancer hachazos y derrotes tous azimuts. Il fit preuve d'un courage inouï, une cogida qui aurait pu être dramatique au quatrième ne l'empêcha pas de retourner au combat le coeur vaillant. Toutefois sa petite taille, ses limites techniques mais aussi le vent qui a soufflé durant toute la course et a beaucoup gêné les toreros, le laissèrent en permanence à la merci de ses adversaires.(salut et salut, où perçaient émotion et reconnaissance du public pour el valor del torero)
DIEGO URDIALES n'a pas cherché aujourd'hui à forcer le destin. Il s'était pourtant montré décidé en réalisant au premier toro de l'après-midi un joli quite par chicuelina. On lui reprochera d'avoir fait assassiner son second adversaire par le picador de réserve après la chute du picador de turno.
SERGIO AGUILAR a tout tenté avec beaucoup de sang-froid et de sincérité mais il eut en partage deux toros sans la moindre charge. Il avait pourtant limité le châtiment de l'imposant sixième en faisant relever l'arme par son picador à la deuxième rencontre. Nous administrant ainsi la preuve que les toros du jour n'avaient pas souffert d'un excès de châtiment mais plutôt qu'il manquait quelque chose à leur moral. (vuelta al ruedo au dernier, toréé sous l'orage)

samedi 23 août 2008

Trois jours à Bilbao

Venir à Bilbao, c'est l'assurance de voir les figuras devant des toros de grande présence. C'est aussi l'assurance de la déception car, plus que dans les autres plazas, on y place la barre de ses propres exigences au plus haut. C'est-à-dire au niveau de ses rêves.

Mardi : triomphe d'Enrique PONCE
S'il est une arène où il faut voir Enrique PONCE, c'est bien Bilbao. Il y a une réelle communion entre le torero et le public. Et ce d'autant que sa tauromachie émeut davantage devant les tios imposants qu'il affronte régulièrement ici. On peut voir dans le patio de cuadrillas la tête d'un Samuel Flores qu'il a tué il y a quelques années. Impressionnant!
Histrion d'EL VENTORRILLO, auquel il a coupé aujourd'hui les deux oreilles en imposait plus par son physique de méchant à l'armure veleta que par sa caste. La faena de PONCE fut celle d'un maître : rythme, élégance, variété, dominio. Avec un final genou ployé qui porta la plaza au rouge vif. Une estocade entière et le président, contrairement à ses habitudes, sortit les deux mouchoirs.
On a souvent vu à Bilbao des actuaciones de même niveau pour lesquelles seule la première oreille était accordée. Personnellement, il m'a semblé que les passages à gauche étaient un peu faibles pour mériter un tel prix. Alors j'ai essayé de trouver la raison d'une telle prodigalité du palco après des années de rigueur. J'en ai trouvé trois et je vous les livre comme elles me sont venues.
La première, c'est que, l'an dernier, Matias Gonzalez, le président a accordé deux oreilles au Cid, que tout le monde l'a félicité pour ce geste et qu'il a peut-être pris goût à la chose (il ne faudrait pas qu'il devienne addict!).
La deuxième, c'est qu'Enrique PONCE ne reviendra pas à Bilbao et que pour sa dernière feria ces deux oreilles sont un hommage à sa carrière. Mais les récentes déclarations du Valencien sur sa présence dans les ruedos l'année prochaine mettent à mal cette hypothèse.
La troisième -c'est ma préférée- est qu'indirectement, le président a voulu hacer daño à José Tomas, absent de la feria, en favorisant Enrique PONCE, torero de Bilbao qui, depuis plus de 15 ans, y affronte avec succès et sans chipoter le toro de Bilbao.
Après plusieurs vaines tentatives, j'ai enfin vu José Maria MANZANARES hijo bon. Torero de classe, muy puro. Mais ce qui lui a manqué aujourd'hui, face à deux VENTORRILLO très nobles, c'est une pointe d'engagement supplémentaire. Beau toreo mais sin chispa ce jour.

Mercredi : LA QUINTA, cruelle déception
Le plus mauvais lot que j'ai vu cette année (toutes catégories confondues). Une faiblesse déplorable, une fadeur désespérante, le tout sur un fond de noblesse imbécile. Si c'est ça l'avenir des Santa Coloma alors il ne nous reste plus que les yeux pour pleurer.
Juan José PADILLA toucha les deux moins mauvais et fut, comme il sait l'être, un bon animateur (une oreille).
EL JULI, après une prestation très décevante la veille (sifflets), se sortit l'épine du pied en inventant une faena au cinquième (une oreille).

Jeudi : MORANTE
Una tarde con MORANTE es diferente. Différente par l'attente qu'elle suscite, mélange d'angoisse et d'espérance. Chaque signe doit être observé. Le vent souffle, le toro a fait un vilain geste dans la cape du peon, c'est sûr, il ne fera rien. Mais voilà qu'il sort au quite l'air décidé, pas de doute, ce sera aujourd'hui le grand jour de MORANTE. De fait, si nous n'eûmes pas de tarde complète, nous eûmes droit à de très beaux moments, de ceux qui restent dans le souvenir. Un bon début de faena par le bas, derechazos de verdad et magnifiques naturelles. Le toro est brave, il va a mas, lance des coups de tête. La fin sera plus confuse, la mort longuette mais MORANTE DE LA PUEBLA saluera sous l'ovation.
Son second toro pousse avec bravoure sous deux piques, mais il est flageolant sur ses pattes. Le président sort le mouchoir vert alors que le toro est encore en train de pousser sous la deuxième pique. Une décision, à mon avis précipitée, qui tue la course. Car sort un sobrero infumable de Manuel Santos Alcalde. Una pena.
Sébastien CASTELLA a l'air un peu perdu dans le vaste ruedo bilbaino. Comparé à la maestria d'Enrique PONCE, il fait figure de novillero débutant.
Je crois bien, si ma mémoire ne me trahit pas, que je n'avais jamais vu de toros de NUNEZ DEL CUVILLO. Ils ne me parurent ni meilleurs ni pires que la plupart des toros d'origine Domecq que l'on voit sortir sur le sable gris de Bilbao. Deux assez bons toros, braves et qui allèrent a mas (le 2 et le 4), deux faibles de pattes qui furent changés, un mauvais toro, le premier de CASTELLA.

Quitter Bilbao est toujours difficile. Il pleut bien sûr, mais ce n'est pas la même pluie qu'à l'aller. Celle-ci a un goût d'automne, de vacances qui se terminent et de temporada sur le déclin.

lundi 11 août 2008

Les Raso de Portillo à Parentis : caste, bravoure et poder

Soyons romantiques. Ont foulé dimanche le sable des arènes de Parentis les descendants de l'élevage le plus ancien d'Espagne (XVème siècle). Et croyons que, malgré les croisements successifs, il reste quelque chose en eux du sang originel. Il y avait en tout cas dans leur comportement comme un parfum des tardes d'antan. Celles qui n'existent que dans le rêve des aficionados les plus fous... et qui parfois se réalisent.
Lourds, con cuajo, avec des cornes abîmées ou discrètes (sauf le dernier). 4 negros, 2 colorados anteados.
Au cheval tous montrèrent poder et bravoure. Les chiffres sont éloquents : une vingtaine de piques prises en poussant dur, 3 chutes, 1 cheval blessé (cornada au cou). Le quatrième fut honoré d'une vuelta al ruedo. Il prit 4 piques (une chute) en poussant fort mais sortant rapidement. Un toro à la puissance explosive qui alla a mas au second tercio au point de déborder Alberto Lamelas avant de le catapulter dans les airs et de le recharger au sol sur une tentative de quiebro. Le malheureux novillero fit front avec vaillance malgré un coup de corne au mollet mais ne put exploiter l'excellente corne gauche du toraco.
Les trois novilleros sont à féliciter pour avoir joué le jeu d'une véritable mise en suerte lors du tercio de pique. En outre, Carlos Guzman montra de réelles qualités muleta en main. Les picadors ont prouvé qu'ils pouvaient être autre chose que les médiocres saigneurs habituels. Il y avait de la grandeur aujourd'hui dans leur office.
La remarquable cavalerie de Bonijol n'est pas non plus pour rien dans cette réussite. Chevaux d'une grande maniabilité qui permettent aux picadors d'appeler le toro avec art, mobilité également sous la poussée qui leur permet de garder l'équilibre malgré la pression, sans dégoûter le toro qui n'a pas le sentiment de pousser en vain.
On trouvera sur le site
Terre de Toros toutes les informations sur l'histoire de cet élevage et ses origines. Bien que je ne sois pas spécialiste en la matière, il m'a semblé que le sixième, différent des autres, avait quelque chose de l'ancienne race des toros navarrais. Soyons romantiques!

lundi 4 août 2008

Hagetmau : un jour sans

Un jour sans pour les novillos de Coquilla de Sanchez Arjona, bien présentés - magnifique le cinquième - mais sans le piquant et la variété de jeu qui avaient fait l'intérêt du lot de Mont de Marsan l'an dernier. Tous se retrouvèrent sans carburant à la sortie de l'unique pique. Certes le principe de la pique unique fit encore des dégâts, mais il y avait autre chose dont il est difficile de savoir s'il s'agissait d'un manque de caste ou bien de force physique.
Jour sans pour les novilleros. Ruben Pinar était aux abonnés absents. José Luis Rodriguez eut quelques détails vite oubliés après une multitude de coups d'épée. Quant à Roman Pérez il se montra comme un véritable sin verguenza. Il toréa son premier comme un bûcheron avant de faire assassiner éhontément le sixième par son picador.
Les trois novilleros sortirent des arènes sous un silence pesant : un jour sans pour le public aussi.