samedi 18 décembre 2021

Angel Teruel

 


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   Avec Ruiz Miguel, Angel Teruel a été le premier torero que j'ai aimé. Rien de commun pourtant entre les deux. Si Francisco Ruiz Miguel a toujours fait partie du camp des belluaires, Angel Teruel, avec ses airs de petit marquis poudré était à mille lieu d'incarner l'idéal viril du dominateur de toros. Et pourtant, les Miuras de Madrid ou de Bilbao qu'il a combattus à plusieurs reprises ne lui faisaient pas peur ! Et surtout ne posaient aucun problème à sa maestria faite d'un mélange de froide intelligence, apanage des fins stratèges et d'un art sincère et subtil qui le rendait capable d'émouvoir aussi le public de la Maestranza.
   En 1967, à l'âge de 17 ans et après 18 novilladas piquées seulement, il prit l'alternative avec succès lors de la feria de Burgos. Il suivait en cela l'exemple de prestigieux prédécesseurs : Paco Camino et José Gomez "Joselito". Lorsque l'on fait preuve de capacités évidentes, point n'est besoin de s'attarder inutilement dans les rangs des novilleros : ce ne peut être que devant des toros que l'on apprend à toréer les toros !
   Au mitan des années soixante-dix, il fut durant quelques temporadas, le torero le plus intéressant et le plus régulier de l'escalafon. Sa froideur de technicien, son affectation furent alors transcendées par sa volonté de s'imposer à tous les toros, à tous les publics et à tous les toreros. Une fois cela acquis, il relâcha ses efforts et quitta les ruedos dans une relative indifférence.
   Le Madrilène était un torero de classe dont l'élégance pouvait parfois passer pour de la préciosité. Le voir traverser lentement le ruedo de son pas mesuré, port altier et lèvres pincées était en soi un spectacle ... que l'on acceptait car on savait qu'il y avait du fond derrière : une lidia précise et dominatrice, un toreo classique et sincère.



lundi 13 décembre 2021

Télévision (2)

   

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   La télévision a acquis aujourd'hui un rôle considérable dans l'économie de la fiesta brava, rôle encore accru à la suite de la crise provoquée par l'épidémie de coronavirus.
   Si la télévision publique nationale espagnole (RTVE) ne retransmet plus de corridas en direct et en intégralité qu'épisodiquement (la dernière remonte à 2016), son rôle a été remplacé dans cette fonction par certaines chaînes régionales et par la télévision payante. Les chaînes régionales (essentiellement castillanes et andalouses) retransmettent tout au long de la temporada de nombreuses courses, la plupart modestes aussi bien par le cartel que par les plazas concernées. La contribution financière versée par ces chaînes, même limitée, permet aux organisateurs de boucler leur budget et on sait que, depuis la crise sanitaire, ce financement a permis à l'activité taurine de se maintenir dans les régions concernées.
   La télévision payante est d'un tout autre niveau. Depuis maintenant plus de 10 ans, le réseau Movistar + (anciennement Canal +) possède une chaîne à péage exclusivement consacrée à la tauromachie qui diffuse en direct et avec des moyens techniques considérables les plus grandes ferias espagnoles. Aujourd'hui - et c'est une nouveauté pour les aficionados français - on peut s'y abonner depuis son ordinateur ou son téléphone portable par l'intermédiaire de la plateforme Plaza Toros TV.
   Lorsque la situation sera redevenue normale (si elle le redevient un jour), on peut dire que chaque aficionado sera en mesure de voir quasiment chaque jour de la temporada une corrida en direct sur un écran et en particulier les cartels les plus attractifs des plus grandes arènes. Le tout pour une somme ridicule en comparaison avec le prix d'un billet d'entrée, et sans être obligé de se déplacer, dans le confort de son univers quotidien.
   Il s'agit d'un changement considérable dans la manière de voir une corrida (dans la manière de consommer du spectacle taurin pourrait-on dire) et dans l'économie de la fiesta. Changement dont nous ne pouvons encore mesurer tous les effets, qu'ils soient positifs ou négatifs, même si certains sont déjà bien visibles, en particulier en Espagne où ce système est en place depuis plusieurs années.
   Sans chercher à rentrer dans une analyse détaillée, j'ai tenté de faire une liste des inconvénients qui me paraissent découler de cette situation.

     - moindre affluence aux arènes.
Toute corrida télévisée constitue une concurrence non seulement pour la corrida télévisée elle-même mais aussi à l'encontre de tout spectacle taurin qui se donne le même jour où que ce soit dans le monde.
En Espagne les personnes âgées ont déjà très largement déserté les gradins, préférant le confort et la sécurité de leur chez-soi. Qui plus est en période d'épidémie, et il semble que nous rentrions dans une époque d'épidémie chronique !

     - moins de convivialité et de relations sociales
On m'objectera qu'il y a les bars et les clubs taurins; mais bien souvent, ce sera seul devant son écran. Rien avant, rien après. Et sans la chaleur et la vibration du public.

     - baisse du niveau de l'aficion
Les commentateurs ont un esprit critique réduit au minimum et sont même parfois passés maîtres dans l'art de faire prendre les vessies pour des lanternes. Dans ces conditions, difficile de former une aficion entendue.

     - fin du plaisir de l'imagination
Il sera possible d'avoir tout vu : les plus grands combats, les toros de bandera, les plus belles faenas. Une banalisation de l'extraordinaire alors que les grands exploits ne sont jamais décevants lorsqu'ils sont imaginés (voire imaginaire).
Sans compter que c'en sera fini de la frustration de n'avoir pas vu une función ou un moment important. Or il n'y a pas de désir sans frustration : nous serons des aficionados blasés.

   Certes ces effets pervers sont compensés par la possibilité  pour les empresas, grâce à la manne financière qu'apporte la télévision, d'organiser leurs spectacles avec plus de facilité et en plus grand nombre. Que cette manne aille en partie dans la poche des sociétés de télévision, des toreros et ganaderos, des organisateurs, c'est la règle du jeu. Mais il faut aussi qu'elle profite directement aux spectateurs qui se rendent à la plaza en permettant une baisse des tarifs à la taquilla. Il parait logique aussi qu'en compensation du préjudice exercé contre les autres spectacles, une partie de cet argent soit utilisé pour assurer l'avenir de la tauromachie, en aidant par exemple les écoles taurines et en contribuant à l'organisation de novilladas.



NB : A la suite de la suppression de l'émission Signes du Toro, toujours pas de réactions. Ni de la part de F3, ni de la part des aficionados (voir Télévision 1).