dimanche 29 mai 2011

Les courses de taureaux expliquées, de Aguado de Lozar (1854) - morceaux choisis

PICAR (piquer). - Combattre les taureaux étant à cheval et armé d'une longue pique. Le mérite de cette passe consiste à empêcher le taureau, dans le moment de l'attaque et au moyen de la pique, d'arriver jusqu'au cheval, de le toucher et de le blesser, manœuvre qui demande non seulement une grande force de bras, mais encore beaucoup d'habileté dans le maniement de la pique et du cheval. (II, p. 64)

PICA (pique). - Lance dont se servent les picadors pour combattre le taureau, étant à cheval. Cette arme est plutôt un aiguillon qu'une véritable lance, car le fer dont elle est garnie n'a justement que la longueur nécessaire (3 centimètres environ) pour entamer la peau de l'animal de manière à ce que la blessure faite par le picador n'ait d'autre résultat que d'irriter le taureau, doubler sa colère et le rendre, par ce moyen, plus propre au combat. (II, p. 67)

SUYO! SUYO! - Cri que poussent les spectateurs et qui signifie : "Donnez lui le taureau!" C'est une espèce de requête adressée à l'autorité présidant les courses, afin d'en obtenir que tel taureau, tué avec une rare adresse par l'espada, lui soit accordé à titre de récompense ou d'encouragement. La même demande est faite aussi en faveur d'un picador ou de tout autre torero, quand ils ont exécuté avec bonheur une passe difficile ou hasardeuse. Autrefois, quand la demande du public était accordée, c'était le cadavre même de l'animal qu'on donnait au torero; mais aujourd'hui, pour éviter tout motif de jalousie, c'est une gratification variant de 20 à 30 fr. qui est donnée au torero, au lieu du taureau mort. Quand l'autorité a obtempéré aux cris de suyo! suyo! le torero, en signe de prise de possession, lui présente, après l'avoir coupée, une des oreilles de l'animal mort. (II, p. 86)

TAUREAUX DE CABRERA, DE UTRERA.
Les propriétés des taureaux de cette ganaderia, dont le trapio (le type) est des plus beaux, consistent en une résistance au fer qui ne s'amollit jamais, un courage et une intrépidité extrêmes, une grande opiniâtreté et une force de tête à laquelle aucun bras de picador ne résiste.
Un des traits caractéristiques des taureaux de cette race, c'est que, dans la dernière période de la lutte, surtout quand ils sont fatigués, ils deviennent taureaux de sentido et d'une grande malice. Alors ils se défendent très bien, sont très difficiles à combattre et offrent de grands dangers à l'espada, qui a besoin d'employer toute les ressources de l'art et de marcher avec les plus grandes précautions. (II, p. 120)

PLACE DE TAUREAUX DE MADRID
Depuis l'établissement des courses à Madrid, il fut décidé qu'elles auraient lieu le matin et le soir du lundi de chaque semaine; mais en 1821 la course du matin fut supprimée; ainsi, depuis lors, elle n'a lieu que dans l'après dîné; dans cette demi-course, huit taureaux sont ordinairement sacrifiés. Ces courses se font constamment tous les lundis de l'année, excepté les mois d'hiver et ceux des plus grandes chaleurs d'été, tels que juillet et août, encore dans ces intervalles sont elles remplacées par des courses de novillos. (II, p. 137)



Alfred Guesdon, Vue aérienne de la plaza de toros de Madrid, 1854, Madrid Musée Municipal


jeudi 26 mai 2011

Le premier manuel tauromachique français


Les courses de taureaux expliquées,

Manuel tauromachique à l’usage des amateurs de courses

par Oduaga-Zolarde
1854

Oduaga-Zolarde n’est autre qu’Aguado de Lozar, l’organisateur des premières corridas françaises qui eurent lieu à Saintesprit (aujourd’hui commune de Bayonne) en 1853.

Publié à la suite du succès rencontré par cette première expérience, on peut considérer que ce premier traité a contribué à former les toutes premières générations d’aficionados français. L’écriture, aujourd’hui délicieusement désuète, mais d’une élégance et d’une clarté exquises n’est pas le moindre charme de l’ouvrage.

On y trouvera pour commencer une défense de la corrida contre ses détracteurs, qui se termine ainsi : « La tauromachie est la plus ingénieuse expression, la plus savante mise en scène de cet antagonisme éternel [entre l’homme et l’animal sauvage]. C’est ce qui explique son règne depuis des siècles, à travers tant de révolutions et de ruines ; c’est ce qui résout ce problème étrange et peut-être unique au monde d’une institution qui date évidemment des temps barbares, et qui demeure debout et plus que jamais florissante au milieu des modernes civilisations. »
Puis un précis historique suivi de la biographie des toreros les plus renommés. Pour l’auteur, « ce fut pendant le règne de Charles II [1665-1700] que les courses atteignirent leur plus haut degré de splendeur ».
Plus tard, « Les dernières années du XVIIIème siècle furent la seconde époque où les courses de taureaux, avec un caractère différent, brillèrent de leur plus grand éclat et atteignirent leur plus haut degré de splendeur, grâces aux deux Romero, à Costillares, à Pepe Hillo, glorieux rivaux dont les efforts ravivaient sans cesse l’intérêt du public et fournissaient des aliments nouveaux à l’avidité des spectateurs, en même temps qu’ils contribuaient puissamment aux progrès de l’art tauromachique ».
Après la nécessaire partie consacrée au vocabulaire taurin, on trouve une notice sur les principales ganaderias espagnoles divisées en trois espaces géographiques : la Castille (les plus nombreuses mais quasiment toutes disparues aujourd’hui), l’Andalousie (avec entre autres Cabrera, Lesaca et el Barbero de Utrera) et la Navarre.

Des bonus particulièrement intéressants sont disséminés au sein du livre :
- une reseña très complète des fameuses premières corridas de 1853, vues par le Courrier de Bayonne, l’Illustration ainsi que par la Presse sous la plume de Théophile Gautier.
- la lettre d’un témoin oculaire décrivant la mort de Pepe Hillo en 1801.

On peut trouver la réédition de l’ouvrage dans les librairies spécialisées. L’édition originale, rarissime, est hors de prix.


lundi 16 mai 2011

Toros en Gironde 2011

CAPTIEUX
dimanche 5 juin à 17h
novillada
novillos de Urcola
Mathieu Guillon - Sergio Flores - Fernando Adrian

des informations complètes sur Rugby y Toros, le blog





LA BRÈDE
samedi 25 juin
à11h
novillada sans picadors
erales de Jean Louis Darré
Dorian Déjean - Kiké - Clementito


à18h
corrida
toros d'Adelaida Rodriguez
U. Moreno "El Zapata" - Diego Urdiales - Julien Lescarret

programme ici


Encore deux cartels très intéressants cette année en Gironde.
A Captieux, des novillos de Urcola, propriété de Victorino Martin, qui proviennent de l'achat effectué en 2005 à Francisco Galache. Un cartel qui aurait été digne de Vic ... s'il y avait eu une novillada à Vic.
A La Brède, ce sera une occasion de voir le matador riojano Diego Urdiales injustement tenu à l'écart par beaucoup d'arènes françaises.




mercredi 11 mai 2011

Leçon de Seville



Un torero a dominé la feria de Séville : José Maria Manzanares hijo.
On a beaucoup devisé aux lendemains de son triomphe historique et de l'indulto qu'il a suscité sur le passage à une étape supérieure et inéluctable dans la propagation du toro à la noblesse excessive, à la férocité gommée, ce petit toro bien fait et qui ne cesse, au troisième tiers, de charger avec une infinie douceur la muleta que lui offre généralement une vedette de l'escalafon.
Oui, mais...
Oui mais, par sa classe, son temple, son esthétique, José Maria Manzanares a éclipsé tous les autres matadors du cycle sévillan. Y compris El Juli qui malgré cinq oreilles coupées a été, du jour au lendemain, relégué au second plan. Sébastien Castella avec une actuation de bon niveau n'a rien dit au public, ne parlons pas de Miguel Angel Perera qui est passé pour un vulgaire pegapase. Daniel Luque, lui, a dû batailler ferme avec un manso querencioso pour couper une oreille. Enrique Ponce, on le sait, a besoin d'un toro qui pose problème pour donner toute sa mesure.
En fait combien sont-ils à pouvoir rivaliser, sur le terrain de l'art, avec l'Alicantin? Morante de la Puebla lorsqu'il parvient à se lever de sa chaise, José Tomas sans aucun doute, et très occasionnellement quelques toreros artistes du type Juan Mora. Sinon personne!
Tous les autres, pour triompher a lo grande, ont besoin du toro encasté qui donne de la valeur à leur courage et à leur technique.
La feria de Séville a marqué, par contre-coup, la nécessité du toro fort, encasté, féroce plus que jamais indispensable au triomphe de la majorité des toreros.

lundi 2 mai 2011

Indulto (3)

En fin de compte, le toro que l'on gracie c'est toujours le gentil toutou, celui qui se laisse toréer à l'infini, qui donne l'impression d'être un ami de l'homme. Bref celui dont la sauvagerie, la férocité ont suffisamment été gommées pour qu'il apparaisse plutôt aux yeux du public comme un animal domestique que comme un toro brave. Or on ne fait pas de mal aux animaux domestiques. Ainsi la boucle est bouclée, on ne gracie pas actuellement les toros pour leur bravoure mais pour leur domesticité. Pour un éleveur digne de ce nom, la grâce est une honte.

dimanche 1 mai 2011

Tauromachie invertie

José Maria Manzanares, le 30 avril 2011, à Séville, a indulté Arrojado, un toro de Nuñez del Cuvillo.
Je n'y étais pas, je ne l'ai vu ni en direct à la télévision, ni en vidéo; je n'ai donc pas d'avis à donner sur le fait lui-même. Ce qui est sûr c'est que l'évènement constitue une apothéose du torerisme dont l'Andalousie en général et Séville en particulier sont l'épicentre. Paradoxalement Arrojado n' a pas permis le triomphe de José Maria Manzanares puisque le torero (on hésite à utiliser le mot matador) ne l'a pas tué et ne lui a pas coupé les oreilles - au final, il s'est borné à le regarder rentrer vivant au corral - mais c'est le torero qui a contribué au triomphe du toro et de son éleveur. Étrange inversion!

De ce début de féria sévillane je retiens autre chose qui me paraît tout à fait navrant pour ceux qui trouvent davantage leur bonheur dans la corrida combat. Les quatre corridas de corte plus ou moins torista qui ouvraient la feria ont toutes fracassé (pour mémoire Conde de la Maza, Dolores Aguirre, Alcurrucen, Victorino Martin). Des toros que l'on attendait costauds et encastés et qui furent faibles et mansos. Des tardes qui auraient dû être passionnantes et qui furent assommantes. Quand le monde à l'envers devient la norme...