mercredi 27 juillet 2016

Notes sur ma Madeleine 2016



  • Snobisme toriste
De nombreux aficionados (dont votre serviteur) avaient choisi d'ignorer la corrida de Nuñez del Cuvillo. Erreur. Sérieusement présentée, avec quelques bons toros et des matadors à leur meilleur niveau (Ponce, Manzanares, Dufau), ce fut la corrida la moins incomplète de la feria, me dit-on de tous côtés.

     • Oracles
Eleveurs et taurins nous bassinent à longueur de temporada sur les hechuras parfaites du toro destiné à embestir. Mais c'est toujours après la course qu'on nous explique qu'avec une telle conformation il était impossible que "Tuertolito" charge correctement. Où étaient-ils, samedi, les oracles du trapío pour embestir qui ont laissé sortir six Fuente Ymbro imbuvables et avaient laissé Minucioso, seul bon toro des sept Fuente Ymbro, comme sobrero?

     • Handicap
Par rapport à leurs cousins des élevages commerciaux qui ont toutes les chances d'être toréés par un fringant matador, les toros des élevages durs souffrent souvent d'un sérieux handicap. Celui de tomber entre les mains d'un matador en dehors du coup. C'est ce qui est arrivé à trois Cebada Gago samedi. Rafaelillo, que l'on croyait dans une période de calme plénitude, a été insupportable : nerveux, heurté, brusque, criard; il a toréé avec une hache en guise de muleta et a rendu le 4 bien plus difficile qu'il n'était au départ. Quant à Perez Mota, que l'on avait pourtant vu plusieurs fois à son avantage lors des temporadas précédentes, il s'est effondré face à l'excellent toro de troisième tiers que fut Soguero et n'a pas remonté la pente face au très brave Volador. Pendant ce temps, Curro Diaz dansait avec la plus laide. Mala suerte.

     • Révélation
Tout le monde a été très agréablement surpris par les excellents novillos de Virgen Maria, l'élevage andalou du Français Jean Marie Raimond. Douze grosses piques prises avec bravoure et codicia dont ils sont sortis gaillards, prêts à assumer pleinement les deux autres tiers, ce qu'ils firent avec caste et franchise.
Il faut sans doute profiter de cet élevage avant qu'il ne devienne comme les autres...

mardi 26 juillet 2016

Mont-de-Marsan



















Dimanche 24 juillet 2016    arènes du Plumaçon    Mont-de-Marsan
beau temps
lleno

6 toros de Miura (14 piques, pitos aux 1 et 2, palmas aux 4, 5 et 6) pour Fernando Robleño (silence, salut), Javier Castaño (silence, silence) et Alberto Lamelas (silence, une oreille).
Salut du banderillero Raul Ruiz au quatrième.

Commencée sous le signe de la colère en raison des problèmes locomoteurs des deux premiers toros, cette cinquième et dernière corrida des fêtes de la Madeleine s'est terminée dans l'émotion la plus authentique que peut susciter une corrida grâce au combat héroïque d'Alberto Lamelas face à Estanquero, le dernier miura de la tarde.
Alberto reçoit son adversaire par une larga cambiada afarolada de rodilla a puerta gayola, puis, près des planches, une autre larga (debout cette fois), des véroniques templées et une rebolera. C'en est trop pour le miura qui crochète le torero, l'envoie au tapis d'un uppercut au visage puis le reprend au sol, l'expédie dans les airs et le jette contre le burladero. Toute l'arène est saisie d'effroi mais, miracle, le maestro, visage ensanglanté pourra repartir au combat et après une faena toute de courage et une estocade en se mouillant les doigts coupera l'oreille de son adversaire aux cris de "torero, torero". Grandeur de la tauromachie!
Après la course, à l'hôpital, trente points de suture recoudront cuir chevelu, joue et dos du héros de la journée.
L'expérience et la technique de Fernando Robleño et de Javier Castaño leur permirent de se tirer honorablement des traquenards tendus toute la soirée par les miuras.
En effet, ceux-ci, inégaux de prestance mais beaux et variés de pelage, avaient un point commun : l'absence totale de ce que l'on appelle en tauromachie la noblesse. Tous raccourcissaient leurs charges, cherchaient l'homme derrière le leurre et se retournaient en quête d'un mauvais coup. Le quatrième, magnifique sardo, fut l'auteur d'un saut parfaitement ajusté dans le callejon. Le 6, enfin, poussa bravement, sur la première pique, jusqu'au centre du ruedo.


jeudi 21 juillet 2016

Retour sur la mort tragique de Victor Barrio

   La mort tragique de Victor Barrio dans les arènes de Teruel, quelques semaines après celles du jeune novillero Renato Motta au Pérou et d'El Pana, vieux matador chevronné au Mexique, a bouleversé les aficionados. Après plus de vingt ans sans tragédie de cet ordre, ces morts viennent nous rappeler à quel point la corrida n'est pas un spectacle ordinaire. La mise à mort du toro dans l'arène peut se payer au prix le plus fort, celui de la vie d'un homme. Il faut, pour devenir torero, non seulement accepter l'hypothèse de cette mort mais aussi la dépasser, être capable la mépriser pour espérer devenir l'être d'exception qu'est le combattant de l'arène. Il s'agit, comme le souligne Francis Wolff, d'une éthique aristocratique mise à portée du peuple. Chaque torero, de la vedette médiatique jusqu'au banderillero le plus modeste, qui torée en respectant la sincérité du jeu de l'arène, devient ainsi un véritable héros.






















   Mais revenons à la médiocrité. La mort d'un matador, quelle joie, quelle délectation pour les militants anti-taurins d'aujourd'hui! La toile s'est aussitôt emplie de centaines de commentaires pleins de morbide satisfaction. Avec quel plaisir ils assisteraient à une corrida s'ils avaient l'assurance qu'à chaque fois un humain y laisserait la vie! On voit bien, par ces réactions, de quel côté sont les barbares et combien pourrait devenir dangereuse pour l'humanité et ses valeurs cette idéologie animaliste si elle parvenait à dépasser le stade du militantisme borné. Par l'étalage irrépressible de la jouissance qu'ils éprouvent à la vue du torero mort, les anti-taurins dévoilent, eux les soi-disant bons apôtres, leur vrai visage, celui de l'abjection et de la haine de l'humain.

Photos : Victor Barrio novillero à Saintsever en 2010

jeudi 7 juillet 2016

Saltillo y Santa Coloma à Roquefort


Le dimanche 14 août, dans les arènes de Roquefort-des-Landes, se donneront deux novilladas aux cartels particulièrement attrayants. Deux ganaderias issues des encastes dits minoritaires feront en effet combattre leurs novillos dans la monumental des Pins.
Alors que la plupart des nouveaux élevages français ont opté de manière très conformiste pour du bétail d'origine domecq, Jean François et Emmanuel Turquay ont fait le choix courageux d'élever du santacoloma. On pourra juger du fruit de leur travail en ce dimanche matin avec les quatre erals qui seront lidiés par Cristobal Reyes et Antoine Madier.
L'après-midi ce seront des novillos de l'historique ganaderia de Saltillo qui fouleront le sable du ruedo roquefortois. L'élevage a créé la polémique lors de la dernière San Isidro. Le lot, manso et très difficile, a suscité une tarde pleine d'émotion mais aux antipodes de la tauromachie actuelle. Pourtant lors de la temporada précédente, un lot brave et noble avait permis à de modestes matadors de couper des oreilles. Qu'en sera-t-il à Roquefort? Après la corrida de Céret, la novillada du 14 août sera un test important pour juger de l'évolution de la ganaderia.






















L'affiche de la journée est classique. Celle à laquelle vous avez échappé, imaginée par Xavier Martin sur le modèle déjà culte de celle de la préfecture, ne manquait pas d'humour, mais elle ne pouvait être retenue pour la simple et bonne raison que, contrairement à ce que croient certains touristes égarés que l'on rencontre parfois dans les rues de la ville à la recherche des fameuses caves, ce n'est bien sûr pas à Roquefort-des-Landes que l'on fabrique le célèbre fromage.






















le projet d'affiche signé Xabi

samedi 2 juillet 2016

Conduite alimentaire imparfaite

   Le Club Taurin Vicois, par un communiqué signé du vétérinaire Jerôme Derrey, donne, comme il s'était engagé à le faire, le résultat des analyses pratiquées à la suite des problèmes récurrents de perte de sabots durant la dernière feria. Il ressort de ce communiqué que "l'explication la plus probable est que ces animaux étaient atteints d'une acidose latente due à une conduite alimentaire imparfaite, alimentation trop riche en glucides et protéines."
   J'aime bien le doux euphémisme employé par le vétérinaire lorsqu'il parle d' "une conduite alimentaire imparfaite" et que l'on pourrait traduire - c'est en tout cas ma traduction personnelle - par : depuis plus de vingt ans qu'on fait des études et qu'on leur dit de faire gaffe à ce qu'ils mettent dans la gamelle de leurs toros, les éleveurs sont des incompétents notoires et de parfaits imbéciles en s'évertuant à n'en faire qu'à leur tête. Incompétent, c'est en effet le terme qui convient lorsque dans sa profession on n'est pas capable d'utiliser les ressources mises à sa disposition pour obtenir les meilleurs résultats possibles. Imbécillité également puisque les résultats obtenus - des toros malades et faibles - vont à l'encontre des résultats espérés.
   A moins que, sous la pression des organisateurs, des publics et de la critique, les ganaderos soient conduits à privilégier les apparences : un toro parfaitement rematé mais au prix du risque de la maladie et de la faiblesse.
   Ou que - et cela est plus cynique et vaudrait pour les élevages les plus commerciaux - on privilégie une certaine faiblesse dans l'espoir de complaire aux figures et de faire partie de leurs élevages de prédilection.












Des animaux bien rematés (Rosa Bonheur, Labourage nivernais, 1845, Musée d'Orsay)

NB  On trouvera sur le blog Vingt passes, pas plus beaucoup d'excellentes contributions vétérinaires sur l'alimentation du toro de combat et sa relation avec son comportement dans l'arène.