jeudi 29 mai 2014

Souvenir d'une grande corrida vicoise : la corrida-concours du dimanche 30 mai 2004

   Pour la première fois depuis 2002, il n'y aura pas de corrida-concours cette année à Vic. Pourtant au cours de ces corridas-concours s'inscrivirent, sur le sable des arènes Joseph Fourniol, quelques-unes des plus belles pages de la feria du Toro. Qui ne se souvient de Camarito de Palha lidié en 2009, des excellents toros de Victorino Martin primés en 2002 et 2003 ou de ceux de La Quinta en 2004, 2005, 2008 et 2012?
   Il y a très exactement dix ans, la corrida- concours du dimanche matin fut une des corridas les plus accomplies et les plus fortes en émotion qu'il m'ait été donné de voir dans ma vie d'aficionado.

   Dès le premier toro nous sommes sur les cimes. Negrero est un magnifique exemplaire cárdeno de La Quinta. Il fait preuve d'une bravoure parfaite en quatre piques. Il poursuit El Fundi à la sortie des banderilles puis se montre noble sur les deux cornes. Le maestro de Fuenlabrada réalise une excellente faena, à la fois dominatrice et artistique, en particulier sur la corne gauche. Il termine par une grande estocade. Deux oreilles pour le maestro et vuelta pour le toro, proche de la perfection.
   Puis sort du toril un très beau Victorino, très armé. Sa course est si vive qu'il heurte un burladero de plein fouet et reste mort sur le sable de la plaza. Un froid s'abat alors sur l'arène : peine pour ce toro brave qui meurt sans avoir pu combattre, dépit pour ce moment perdu - un combat qui s'annonçait beau et qui s'évanouit absurdement.
   Mais la course se poursuit. Voici qu'apparait, hors-concours, un immense toro cinqueño de Criado Holgado. Il va prendre cinq piques en venant fort et de loin, cinq piques qui semblent lui donner chaque fois un surcroît de puissance et de codicia. A la muleta, le petit Robleño se bat comme un lion. Un derrote lui coupe la cravate en deux. A la mort c'est mission impossible. Ovation pour Fernando Robleño et pétition de vuelta pour le remplaçant qui a réussi à faire oublier le Victorino.
   Le troisième toro de Cuadri va permettre une pause dans les émotions. Il a le type massif de la maison ainsi que la bravoure et la noblesse mais c'est un invalide croulant sous les kilos.
   Voici maintenant le San Martin, de format plus réduit, rond, negro lucero, calcetero. Il prend deux piques qui durent plus de cinq minutes chacune car il refuse obstinément de quitter le cheval malgré les nombreux tirages de queue dont il est l'objet. Sa noblesse ne sera pas exploitée par Fernando Robleño.
   Le cinquième appartient à la ganaderia de Fuente Ymbro. Grand, haut, armé discrètement, il fait preuve de caste et d'âpreté et sera parfaitement lidié et dominé par El Fundi, grand torero à la maturité rayonnante (une oreille).
   Le dernier toro de Clemares Perez Tabernero, après un tour de piste au galop, se révèle invalide. Il sera remplacé par un deuxième sobrero de Criado Holgado, autre cinqueño puissant et brave (deux chutes de l'excellente cavalerie d'Alain Bonijol). Robleño l'affronte avec courage et parvient au cours d'une faena vibrante à  dominer la violence du tío par de bonnes séries de derechazos. Hélas, sa petite taille l'empêche à nouveau de tuer correctement ce qui réduit son succès à une forte ovation.
   Ainsi se termine la course, témoignage de la grandeur de la fiesta brava et désormais souvenir précieux dans la mémoire des aficionados présents.

jeudi 22 mai 2014

Madrid 8 juillet 1793, la mort d'un picador

   La mort rôde toujours dans les plazas de toros. C'est l'essence même de la tauromachie  de permettre sa présence et de jouer avec. La suerte (le hasard) et bien sûr les progrès de la médecine font que, le plus souvent, elle ne parvient pas à ses fins.
   Parfois pourtant la suerte tourne à l'aigre.
   Mala suerte pour le picador José Muñoz le 22 mai 1999 à Vic-Fezensac.
   Mala suerte, quelques deux cents ans plus tôt, le lundi 8 juillet 1793, pour le picador Bartolomé Carmona à Madrid.
   Ainsi en  témoigne le Diario de Madrid (il s'agit là d'un extrait d'une des toutes premières reseñas de corrida) :

   El cuarto, de Castilla la Vieja, entró muy ligeramente a una vara y a seis banderillas de fuego. A la sexta saltó la barrera con la banderilla encendida. Lo mató Pedro Romero. Este toro no entró a la espada sin levantar la cabeza a una altura tan desmedida que frustraba enteramente la acción de la espada. Despues de la primera estocada que fue bien puesta pero que por esta causa no pudo ser profunda, acometió al caballo en el que estaba Bartolomé Carmona, quien no huyo a la carrera como hubiera podido, y cogió el caballo de manera que no tan solo hirió a éste de muerte sino que en la caída que dio Carmona le sucedió la desgracia de recibir un golpe fuerte en la nuca, que de resultas murió parece a breve rato; lo mató Romero a la segunda estocada puesta con mucha inteligencia.

   Le quatrième, de Castilla la Vieja, prit une pique par surprise puis six banderilles de feu. A la sixième il sauta la barrière avec la banderille allumée. C'est Pedro Romero qui devait le tuer. Ce toro arriva à la mort en levant la tête à une hauteur si démesurée qu'il empêchait totalement de porter une estocade efficace. Après le premier coup d'épée qui fut bien placé mais qui pour cette raison ne put entrer profondément, le toro fonça sur le cheval monté par Bartolomé Carmona, qui ne s'enfuit pas au galop comme il aurait pu le faire, et renversa le cheval de telle manière que non seulement il le blessa à mort mais que lors de la chute que fit Carmona celui-ci eut le malheur de recevoir un violent coup sur la nuque dont il mourut peu de temps après; Romero tua le toro à la seconde estocade placée avec beaucoup d'intelligence. 























Goya La mort du picador 1793

mardi 13 mai 2014

Juin 2014 en Gironde



Juin c'est le mois des toros en Gironde avec, cette année encore, deux cartels de grand intérêt.

CAPTIEUX
dimanche 1er juin 17h
novillada
El Tajo La Reina
Fernando Rey - Clemente - Andrés Roca Rey







LA BRÈDE
samedi 21 juin

11h 30 novillada sans picadors
Frères Bats "Alma Serena"
El Adoureño - David Menes

18h corrida
Fuente Ymbro
Alberto Aguilar - Perez Mota - Juan Leal

La Brede 2014




mardi 6 mai 2014

La trastienda


La trastienda
 film de Jorge Grau  avec Maria José Cantudo  1975

   Nous sommes en 1975, Franco vient de mourir. Depuis quelque temps déjà, les Espagnols qui vivent près de la frontière se précipitent dans les cinémas de Biarritz ou de Perpignan pour voir des films pornographiques ou tout simplement érotiques. La chape de plomb de plusieurs siècles de catholicisme, renforcée par trente-cinq ans de dictature, est prête à se fissurer. L'heure n'est certes pas encore aux débridements de la movida madrilène dont témoignera quelques années plus tard le cinéma de Pedro Almodovar, mais Jorge Grau, avec La trastienda, sera le premier à profiter des ouvertures que permet désormais la censure. La trastienda restera en effet dans l'histoire du cinéma espagnol comme le premier film dans lequel on voit une femme nue. La belle Maria José Cantudo y gagnera une renommée nationale.
   Le scénario du film est cependant d'une grande banalité : un très catholique chirurgien pamplonais s'éprend d'une jolie et aguicheuse infirmière au grand dam de son épouse légitime qui n'est pourtant pas elle-même irréprochable (occasion d'une scène réellement sulfureuse). Bref, pas de quoi révolutionner le septième art.
   Pour l'aficionado, l'intérêt vient de ce que le film se déroule en pleine feria de San Fermin 1975. Depuis le riau-riau du 6 juillet jusqu'au pobre de mi du 14, l'action dramatique est parfaitement scandée par les différents moments de la fête, ce qui nous vaut, d'un point de vue documentaire, un témoignage remarquablement riche et fidèle sur ce qu'étaient les sanfermines dans les années 70.
   1975, c'est aussi l'année de l'encierro dramatique du 9 juillet au cours duquel Gregorio Gorriz Sarasa, bloqué par le monton qui s'était formé à l'entrée des arènes sera tué par "Navarrico" d'Osborne. Sans montrer la cornada fatale, les caméras de Jorge Grau témoignent longuement du tragique de l'encierro.

vendredi 2 mai 2014

Aire : la novillada-concours



Puisqu'il s'agissait d'un concours - bien que sans vainqueur déclaré - je classerai (forcément subjectivement) les élevages par ordre de mérite.

1- François ANDRÉ (sorti en 1) or. Cobaleda (Vega - Villar)
cárdeno claro, léger, cornalon
remate aux planches
4 piques en venant avec un franc galop, la dernière de très loin (très bien le piquero, Pepe Aguado, ovationné)
noble mais un peu soso au troisième tiers
commence à chercher les planches à mi-faena, défaut qui lui a sans doute coûté le prix.

2- Jean Louis Darré "L'ASTARAC" (sorti en 5) or. J. Riboulet "Scamandre" (Parladé - Gamero Civico)
noir, musclé, discrètement armé
mal mis en valeur et trop châtié en 3 piques où il rentre violemment et pousse avec force
noble mais va a menos pour finir parado.

3- BLOHORN (sorti en 3) or. domecq
colorado
3 piques sans brio
noble, répète bien ses charges à la muleta.

4- GALLON (sorti en 2) or. domecq
noir, bien armé, joli novillo
3 piques avec indécision
noble mais de parcours réduit.

5- TARDIEU (sorti en 4) or. nuñez
noir, grand, ensellé
2 piques inégales
noble sans alegria.

6- MALABAT (sorti en 6) or. El Palmeral (Atanasio Fernandez)
negro bragado meano, léger, corniabierto
fuyard, difficile à fixer
3 piques dans la pagaille
inabordable sur les deux cornes après quelques passes.

Chez les bipèdes :
Curro DE LA CASA eut une mauvaise journée : sans transmission, embrouillé, mauvais tueur. A noter la présence de David Adalid (salut au 4) dans sa cuadrilla.
Francico José ESPADA montra quelques beaux gestes, doux et templés, tout en restant un peu distant, mauvais tueur.
Daniel SOTO débutait en novillada piquée; vaillant, varié à la cape; bonne faena face au Blohorn, il perd l'oreille à la mort; s'en sort bien avec le garbanzo negro de Malabat qu'il tue habilement. Un début encourageant.

Sans atteindre les sommets, la tarde fut toujours entretenida.

prix au meilleur novillo : non attribué
prix au meilleur picador : Pepe Aguado