jeudi 31 août 2017

Damaso Gonzalez




    Lorsque je pense à Damaso Gonzalez deux images me viennent à l'esprit. Son beau visage buriné d'Espagnol humble et modeste. De ceux qui ont souffert mais auxquels le courage et l'opiniatreté ont permis de surmonter les épreuves. Je vois ensuite la frêle silhouette du torero face à un toro, un toro plus grand que lui sans que cela ne semble l'émouvoir. Tout Damaso est là. Sa grandeur face à l'adversité. Sa rugueuse beauté sans afféterie.
   Dès le début des années soixante-dix, notamment grâce à ses importants triomphes en 1970 et 1971 à Bilbao, Damaso deviendra une figure. Son aspect malingre, son toreo qui mêlait classicisme et tremendisme (dans la lignée des toreros d'Albacete tels Chicuelo II et Pedres) le firent comparer à Juan Belmonte. Il forma alors une pareja avec Paquirri et leur tâche ne fut pas simple de succéder aux grands maestros des décennies précédentes et de s'adapter au retour du toro de quatre ans à partir de 1973.
   Damaso appartient à la catégorie des toreros qui cherchent à reproduire la même faena à chaque toro. Le toro commercial de cette époque étant tout aussi médiocre que celui d'aujourd'hui, sa tauromachie finit par ennuyer. Il eut alors l'intelligence de toréer les élevages plus difficiles. Et, ce qu'il faisait aux toros commerciaux, il fut capable de le faire à tous les toros. Sa carrière s'en trouva relancée et il y gagna l'estime des aficionados. Puis une autre grâce lui tomba dessus : son toreo basé sur l'aguante, le temple, l'encimisme fut considéré comme un chaînon important qui mène, dans l'évolution de la tauromachie, de Juan Belmonte à Paco Ojeda. Son aura s'en trouva confortée.
   En cherchant dans mes souvenirs (et donc dans mes archives) je m'aperçois que j'ai vu toréer Damaso essentiellement devant des Miura et des Pablo Romero. C'est à Logroño, en 1986, dans les vieilles arènes aujourd'hui disparues, face à des toros de Pablo Romero que je l'ai vu donner sa pleine mesure. Quel temple prodigieux! Quelle aisance pour dominer ces pablorromeros nobles mais imposants! De cette journée je me souviens aussi du sourire radieux de Jaime de Pablo Romero félicité dans la rue en fin de course par des aficionados pour l'excellent jeu de ses toros. Il ne savait pas que cette course était en fait leur chant du cygne. Aujourd'hui les Pablo Romero ne sont qu'un souvenir qui, parfois, resurgit chez Partido de Resina, et Damaso Gonzalez est mort.















Face à un Miura à Bilbao (photo Chapestro)

lundi 28 août 2017

Novillada concours de Saintperdon : Tan petit tan hardit

   Le concours ne s'anima vraiment qu'à partir de la sortie du cinquième novillo. Et pourtant celui-ci, ainsi que le suivant, ne payait pas de mine. Tout deux étaient de format si réduit qu'ils auraient pu figurer en non piquée. Malgré cela, les trois piques qu'ils prirent (en poussant) n'altérèrent en rien leur vivacité et leur capacité à charger! Tan petit tan hardit!

   CUADRI fait rarement combattre des novillos. Il était intéressant de voir si, à trois ans, sans avoir le volume des adultes de la casa et avec l'insouciance de l'adolescence, le dénommé Pinzón ferait preuve de l'alegria qui manque souvent à ses ainés. Et bien non! Faible, noble mais limitant très vite ses charges pour finir arrêté, il fut arrastré sous les sifflets. Cuadri encore au purgatoire.
   Cantador d'ESCOLAR GIL, bien roulé, avait des qualités mais il eut le malheur de tomber entre les mains d'un novillero (Isiegas) qui ne se soucia pas le moins du monde de le mettre en valeur aux piques.
   Le pensionnaire de VALDELLAN fit impression à la première pique qu'il poussa avec acharnement. Sa distraction à la deuxième fit se poser des questions. En fuyant de la troisième il révéla son état de manso, ce que confirma sa recherche des planches au troisième tiers.
   Anodin sous deux piques et sans charge le VIRGEN MARIA. Une déception si l'on songe à l'excellent combat de ses frères dans ce même ruedo pour la novillada de la Madeleine l'an passé.
   Un murmure d'horreur et de désapprobation parcourut le public lorsqu'apparut le pupille de PEDRAZA DE YELTES tant il était laid et rachitique. C'est pourtant lui qui lança le concours (il était temps) en prenant trois piques poussées et en faisant preuve d'une vive noblesse à la muleta. Un défaut toutefois : une propension à garder la tête dans les nuages dès qu'il n'avait plus la muleta sous les yeux.
   Rascatripas,enfin, de la ganadería de PINCHA était lui aussi un novillo miniature. Mais bien fait, harmonieux de forme. Dès les premières passes de cape, sa charge est soutenue, cornes au raz du sable. En trois piques (la dernière donnée avec une pique de tienta) il fait preuve d'une bravoure supérieure. A la muleta, sa noblesse pleine de codicia est de celle qui permettent les grandes faenas. Il meurt en résistant. Un grand petit toro, honoré d'une vuelta et vainqueur du concours. On voit à longueur de temporada tant de toros médiocres issus des ganaderias les plus huppées de sang domecq qu'on ne peut qu'être à la fois étonné et réjoui que la famille Baigorri à Lodosa en Navarre puisse recéler de tels trésors de caste. Pincha, une ganaderia à suivre.
   Les novilleros ne sortirent pas de la médiocrité. Avec des excuses pour Diego Carretero, le plus mal servi. Jorge Isiegas, vulgaire. Tibo Garcia avait bien toréé Rascatripas sur la corne droite mais il fut catastrophique à la mort.

















Tibo Garcia face à Rascatripas de Pincha (Photo Laurent Bernède)

samedi 26 août 2017

Bilbao, trois jours






















Bilbao, lundi 21 août
   Intense moment d'émotion avant le paseo avec un poignant Agur Jaunak écouté avec recueillement en mémoire d'Ivan Fandiño.
   Ensuite l'assoupissement est  général, il fait très chaud, les six toros d'Alcurrucén étalent les uns après les autres leur manque de caste. Au quatrième, le moins mauvais, Curro Díaz montre son élégance, mais il torée superficiellement, la jambe de sortie systématiquement en retrait, le toro finit par se lasser, le président accorde une oreille généreuse.

Bilbao, mardi 22 août
   Les six Jandilla de ce jour sont très en-dessous des lots du même élevage combattus à Vista Alegre les années précédentes. Bien présentés certes, mais faibles, sans présence à la pique, nobles. Des domecqs de consommation courante.
   Garrotero, le quatrième est toréé par le Juli avec une si douce et efficace persuasion qu'il semble prendre goût au jeu de muleta. Tant et si bien qu'au moment de l'estocade il continue à avancer vers elle semblant dire au Madrilène : "Si on continuait encore un peu à jouer ensemble".
   Sans problème pour Roca Rey : oreille, oreille.

Bilbao, mercredi 23 août
   La corrida débute par un joli geste du public bilbaíno : une ovation nourrie à l'adresse de Diego Urdiales qui l'oblige à saluer. Tout au long de la tarde le Riojano se montrera à la hauteur de cet accueil cariñoso.
   Comme celui de Jandilla la veille, le lot entier de Victorino Martin aura des problèmes de faiblesse de pattes. Toros qui perdent leurs appuis dès les premières passes de cape et lors du tercio de varas. Cela culminera avec le sixième renvoyé au corral et remplacé par un grand bœuf cinqueño de Salvador Domecq. Mais le lot, par ailleurs d'excellent trapío, se sauvera par sa caste. Le premier est une alimaña classique de la casa, les autres braves et nobles avec mention pour le cinquième Mecatero un cárdeno plus rond et moins armé que ses frères.
   Diego Urdiales a été parfait avec le premier. Serré dangereusement à la cape contre les planches il parvient à se libérer et à amener la fiera au centre avec torería. A la muleta il débute par des passes de châtiment appuyées puis tente de toréer avec sincérité sur chaque corne. Mais Bohonero reste intraitable et le maestro en termine par du macheteo et une entière (ovation). Face au quatrième on a retrouvé le Diego Urdiales mainteneur du toreo classique et profond. Il y eut notamment trois véroniques extraordinaires qui firent rugir le public et une série de derechazos d'un temple et d'un rythme parfait. Seul point négatif, en fin de faena Diego se laissera entrainer par le toro vers les tablas. Oreille après un pinchazo et une entière.
   Face au cinquième, Manuel Escribano a livré une actuation complète. Accueil par larga a puerta gayola, banderilles millimétrées avec quiebro au fil des tablas, faena reposée qui culminera dans des séries droitières données la main basse, enfin une grande entière. Une oreille avec pétition de la seconde et un torero que l'on a retrouvé à son meilleur niveau.
   Paco Ureña, avec cette sincérité si émouvante qui lui est propre, ne trouva pas d'adversaire à sa mesure. Une oreille du troisième après une excellente estocade.

samedi 19 août 2017

Retour en photos sur la novillada de Roquefort
















Manuel Ponce, farol de rodilla a puerta gayola


















Changement de main dans le dos de Manuel Ponce



















Daniel García Navarrete

















Capeina de García Navarrete

















Le sixième Saltillo a de l'allure mais reste court de cornes.


Toutes les photos sont de Laurent Bernède

vendredi 18 août 2017

A propos de la corrida de Pedraza de Yeltes à Dax

   Voici les réflexions qu'a inspirées la corrida de Pedraza de Yeltes à Thierry Wagniart, aficionado bien connu du côté de Roquefort et de Tyrosse mais qui ne dédaigne pas, à l'occasion, s'asseoir sur les gradins dacquois.

DAX-Lundi 14 Août.
Magnifique de présentation, de prestance dans la piste, la Corrida de Pedraza de Yeltes fut une très bonne Corrida de ...3ème tiers. Je m'explique. J'ai en mémoire celle de 2014 dans ces mêmes arènes, qui fut à mon avis, la Corrida la plus complète que j'ai eu l'occasion de voir depuis ce début du siècle. Trois années se sont écoulées, les Pedraza sont toujours des estampes de toros...mais ils se sont bien adoucis. En 2014 , sortant des arènes envahi d'une grande émotion je m'étais dit que jamais les figuras de notre époque ne voudront lidier de tels toracos, qui pourtant possédaient déjà les ingrédients pour réaliser des faenas pour l'histoire, a condition bien évidemment de faire les choses biiiièèènnnn!!!
Qu'avons nous vu hier dans cette belle Plaza Dacquoise ? Des Pedraza spectaculaires sous La première pique, poussant très fort sous le peto. Hormis le 6ème qui fut extraordinaire en trois rencontres, ils ont tous subi cette première pique. La différence avec 2014 est là. Il y a trois ans, La Corrida entière avait livré un 1er tiers bouleversant, d'une grande intensité, d'une incroyable force, des toros partant avec joie et au galop à plus de vingt mètres du cheval pour y exprimer une bravoure puissance 10 ! Le Grand frisson ! Quelle fijeza au cheval...j'en frissonne encore.
Rafaelillo fut bien toute la tarde, écrire qu'il fut en dessous de l'excellent 4ème me fait mal au cœur. Que voulez-vous, lorsque l'on est habitué et obligé de s'envoyer tous les Toracos de la terre depuis 15 ans et de leur monter des faenas de "Valiente couillu", on ne peut pas lui demander de nous faire Une faena avec certains arômes Sevillans...Rafa reste Rafaelillo et c'est très bien. Hier il a touché le bonbon de la tarde, il en a bien profité, certes avec sa technique à lui, le peuple dacquois était heureux pour lui, moi aussi...
Ah! si Daniel Luque l'avait tiré au sort ce 4ème! Ah! Si ma tante en avait!...la pauvre, paix à ton âme Tatie. Le fin Torero de Gerena ( il s'est un peu épaissi...non?) réalisa tout au long de l'après-midi une tauromachie de grande classe, une multitude de détails à son premier, nous rappelant à son second qu'il est un très grand capeador. Mais ses deux Pedraza manquèrent de force pour monter "la faena" qui aurait fait chavirer la Plaza Dacquoise dans un immense bonheur. Il tua ses deux adversaires de deux épées légèrement basses, qui lui permirent de couper deux oreilles et de sortir en triomphe des arènes avec Rafaelillo.
Roman m'a déçu. Ce torero m'avait plu cette saison à Madrid et Pamplona. Hier il n'a jamais trouvé le sitio, n'a jamais trouvé le bon rythme, surtout avec l'excellent 6ème. A sa décharge aussi, une cuadrilla douteuse toute l'après-midi...hormis ce formidable picador, Pedro Iturralde, sensationnel hier en trois piques données au dernier Pedraza...me rappelant 2014! Pedro Iturralde "Grande Figura" de la confrérie des Castoreños.
Suite à cette course, je me dis qu'il est fort possible que l'on ait trouvé chez Pedraza de Yeltes le juste milieu dans l'évolution du toro moderne. Un toro pour contenter tout le monde : Grand Public, Aficionados et ....Toreros. Mais attention de ne pas adoucir plus que cela pour que les figuras viennent se frotter les oreilles à ces Pedraza.
Un rêve, un rêve fou. Une pensée me traverse l'esprit .... et si celui de La Puebla revenait aux affaires l'an prochain avec des Pedraza ... à Dax !

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mercredi 16 août 2017

La novillada de Saltillo à Roquefort

   Les novillos de SALTILLO lidiés dimanche à Roquefort n'étaient pas, en ce qui concerne le trapío, dans les canons habituels de la Monumental des pins. Ils n'eurent pas non plus la bravoure ni la caste que manifestèrent leurs frères dans ce même ruedo l'an passé. Si la novillada résulta malgré tout intéressante, on le doit à leur variété de comportement. On le doit aussi à l'entrega et à la toreria dont firent preuve à tout moment les novilleros.
   Les trois premiers novillos furent mansos et nobles. Avec cette fadeur qu'ont souvent  saltillos et santacolomas lorsque leur noblesse n'est pas soutenue par la caste. Trois novillos de plus de cet acabit et la tarde risquait de sombrer dans l'aburrimiento. Mais vint le quatrième. Le garbanzo negro. Un manso de mala casta, de ceux qui tantôt viennent directement sur l'homme, tantôt refusent de rentrer dans la suerte. Heureusement, picadors, peons et novillero (Manuel Ponce) ne cédèrent pas à la panique - qui pourtant menaçait à tout instant -  et firent même preuve d'une belle efficacité et rapidité dans la lidia. Le cinquième vite arrêté fut le moins intéressant. L'ultime, de ligne magnifique mais cornicorto, fut un bon novillo, le meilleur de l'après-midi. Brave en deux piques mouvementées puis d'un long et noble parcours sur les deux cornes. A la sortie, l'aficion était partagée entre ceux qui auraient désiré voir le novillo une troisième fois face au cheval et ceux qui pensaient qu'il était bon de lui avoir gardé de l'alegria pour le troisième tiers.
   Manuel PONCE alla par deux fois a puerta gayola, se faisant ôter la montera par le quatrième. Les habitués de la plaza landaise se rappelleront qu'il y a une vingtaine d'année, Francico José Porras, en tentant la même suerte face à un Barcial, mais lui avait cité au centre du ruedo (!), avait manqué se faire guillotiner, avant de terminer, emporté par l'hélicoptère, à l'hôpital de Mont de Marsan suite à un violent accrochage durant la faena de muleta. Aujourd'hui une honnête faena aurait pu valoir une oreille à Ponce, sans une estocade bien trop décalée.
   Miguel Angel PACHECO donna au second quelques belles naturelles et des pechos très toréés. Une oreille après une media efficace.
   Enfin Daniel GARCIA NAVARRETE mit en évidence à ses deux novillos son aguante et la souplesse de sa ceinture et de son poignet, lui permettant de donner des passes longues. Il y a chez ce torero une belle promesse encore en gestation : il éprouve des difficultés pour lier ses passes et recherche parfois trop systématiquement l'esthétique. Oreille chaque fois.















 Garcia Navarrete face au 6 (photo Laurent Bernède)

mardi 1 août 2017

Novilladas d'août dans le Sud-Ouest

   En février dernier, l'excellente revue ToroMag a consacré son numéro 78 à la novillada piquée. Plus exactement à la crise de la novillada piquée. Chiffres, analyses, entretiens alimentent un dossier très complet.
   C'est une évidence que la novillada piquée est un maillon essentiel dans la formation des futurs matadors et qu'à ce titre elle joue un rôle primordial pour l'avenir de l'art taurin. Mais il y a plus : une novillada est très souvent un spectacle bien plus intéressant que ces banales corridas avec matadors vus et revus et toros aux comportements prévisibles.
   Il est bien sûr du devoir des aficionados de le faire savoir et, par leur présence massive, de soutenir, en tous points de la planète taurine, les organisateurs de novilladas.
   Dans le Sud-Ouest, le mois d'août est traditionnellement riche de novilladas aux cartels attractifs :

     Riscle
samedi 5 août
Marquis d'Albaserrada
David Garzon - Juan Carlos Benitez - Cristobal Reyes

     Parentis
samedi 5 août
Monteviejo
Manuel Ponce - Daniel Menes - Miguel Angel Pacheco

dimanche 6 août
Prieto de la Cal
Mario Palacios - Guillermo Valencia - Tibo Garcia

     Soustons
dimanche 6 août
Fernando Peña
Leo Valadez - Rafael Serna - Adrien Salenc

     Roquefort
dimanche 13 août
Saltillo
Manuel Ponce - Miguel Angel Pacheco -  Garcia Navarrete

     Saintperdon / Mont de Marsan
dimanche 27 août
novillada concours
Cuadri  -  Escolar Gil  -  Valdellan
Virgen María - Pedraza de Yeltes - Pincha
Diego Carretero - Jorge Isiegas - Tibo Garcia