lundi 28 août 2023

Retour à Bilbao (suite)

 

 
   Retour à des températures normales jeudi et un gros trois quart d'arène pour un cartel très original qui vaut bien cette fois un tendido ombre, file 17 à 73 €.
   Le lot du Puerto de San Lorenzo comprend deux bons toros. Le second est même excellent : brave (belle deuxième pique en partant de loin), encasté, avec un galop puissant et des cornes dont il connait l'usage; le troisième d'une belle mobilité. Mais les autres sont allés a menos, réservant leurs charges, sortant de la muleta en fuyant et cherchant les planches. De ce fait la corrida se termina sur un sentiment de déception et de frustration.
   Après les broncas et insultes de la veille, Morante n'avait aucune raison de répondre à l'ovation initiale destinée à saluer le retour de Roca Rey à Bilbao. En revanche c'est devant le toro qu'il mit les choses au point en signant au quatrième trois véroniques et une demi que seul son génie pouvait donner.Les olés sortent du plus profond, le public est debout, l'ovation tonitruante et la réconciliation scellée (au moins provisoirement).
   On ne voit pas souvent Manuel Escribano (oreille du 2) dans ce genre de cartel; à tort car il constitue pour le public une garantie de spectacle et de professionnalisme.
   Roca Rey (oreille du 3), a medio gaz, tenta de mettre le fuyard sixième dans sa muleta sans y parvenir tout à fait. Il ne possède pas encore la science de maître Ponce, si appréciée en ces lieux.

   Comme l'aller, le retour se fera en bus. Pas de souci de voiture et tarifs très abordables. À Bilbao, la nouvelle gare routière, tout comme celle de Saint Sébastien, offre le même confort qu'un aéroport. Mais, signe des temps, je ne trouve pas le moindre dépôt de presse pour acheter un journal local. En France, les arrêts (Biarritz, Bayonne, Bordeaux) sont des terrains vagues sans même un point d'eau et jonchés de papiers gras. Faut-il voir dans ce manque de respect un lien avec le fait que ce sont essentiellement les pauvres qui utilisent l'autobus pour voyager ? Quant à l'option chemin de fer, elle existe. Je me souviens l'avoir utilisée plusieurs fois à la fin des années 70 lorsque les terroristes d'ETA, entre deux assassinats, prenaient un malin plaisir à incendier les voitures françaises qui se risquaient au Pays Basque espagnol. Mais si la situation politique s'est aujourd'hui largement apaisée, rien n'a changé au niveau des transports ferroviaires. Rejoindre Bilbao en train est toujours un véritable  parcours du combattant qui demande la journée et je n'ai pas l'impression que les choses vont changer de sitôt tant les résistances sont nombreuses (y compris celle des écologistes) sur le développement du rail. Vous avez dit réchauffement climatique ?
 
 
PS : Je me réjouis qu'une des plus intéressantes corridas du cycle ait été celle de Dolores Aguirre, dimanche pour la clôture. Et je déplore qu'elle ne se soit donnée que devant à peine 3000 spectateurs. Misère de l'aficion basque.  
 
 


 
 
Photos :
     El Anatsui - Musée Guggenheim
     Morante de la Puebla - Plaza de toros

dimanche 27 août 2023

Retour à Bilbao

 

    Me revoici à Bilbao pour deux jours, ma dernière venue ici, en 2019, avait été marqué par l'énorme triomphe de Paco Ureña. Beaucoup d'eau a coulé sous le pont de l'Arenal depuis. Il y a eu du bon : la rénovation des arènes par la nouvelle empresa (Chopera/Bailleres) et beaucoup de mauvais : deux années d'interruption par peur d'un virus, une accentuation de la baisse de fréquentation (catastrophique les jours sans figures), et dernier avatar, l'hostilité de la municipalité (PNV) qui a refusé cette année la participation aux festejos taurins de la Banda Municipal de musique et ne mentionne plus les corridas dans le programme des fêtes. En contrepartie, l'empresa a pris l'initiative de financer une campagne de publicité dans la ville. Initiative heureuse qui se doit d'être portée à son crédit. Les rues et le tramway sont pavoisés, nul à Bilbao ne peut ignorer qu'on y donne des corridas et je dois dire que c'est une belle satisfaction pour l'aficionado de se promener dans une ville au milieu de magnifiques photos de toros et portraits de toreros. Il est nécessaire aujourd'hui d'affirmer notre culture dans son histoire et sa tradition mais aussi dans sa réalité contemporaine. Sans complexes ! À Bilbao, c'est en s'appuyant sur l'existence des Corridas Generales que l'Aste Nagusia (Semana Grande) a vu le jour et aujourd'hui la corrida reste le spectacle des fêtes capable de réunir le plus grand nombre de spectateurs payants. 

   La petite demi arène de ce jeudi montre toutefois qu'il reste du chemin à parcourir. Il faut dire que la température extrême (44° à l'ombre) n'a pas incité les non possesseurs de billet à se déplacer. Sans compter que le prix des places aux tendidos de sombra est lui aussi extrême : de 194 € la barrera à 73 € la file 19. Un calcul sommaire permet de se rendre compte que pour simplement 1000 places vendues l'empresa empoche largement plus de 100 000 € ! Je n'ai rien contre le fait de faire payer les riches (et il y en a beaucoup dans une ville comme Bilbao) mais les gens ne sont pas non plus des gogos, ce qui explique que, alors que les tendidos ont du mal à se remplir, la galerie ombre (la partie la plus haute de l'arène) où les places sont à 16.50 €, est toujours copieusement garnie. 
   Ayant estimé que voir lidier une corrida de Juan Pedro Domecq ne méritait pas de frais excessifs c'est là que je me trouvais. On y perd incontestablement en émotion si le combat est rude, beaucoup moins si le travail est artistique et l'endroit est parfait pour juger du placement des toreros. À ce sujet, j'ai noté l'effort de sincérité de Manzanares à son premier toro avant qu'il ne retombe dans le néant taurin à son second. En tout état de cause ses deux domecqs furent sous-employés. Mais lorsque à la fin de la corrida, devant les arènes, José Maria a passé un très long moment à se faire photographier et à signer des autographes, j'ai compris qu'il était, à cet instant précis, en train d'accomplir ce pourquoi les organisateurs l'avaient embauché.
   J'attendais si peu des JPD que je ne les ai pas trouvés si mauvais que ça. Excellemment présentés (Bilbao oblige), ils sont allés au cheval avec facilité et quatre d'entre eux n'ont pas par la suite offert de grandes facilités aux toreros. C'est sans doute ce qui leur sera reproché, tant aujourd'hui, aussi bien parmi la majorité des critiques que parmi les aficionados des plus grandes arènes espagnoles, un toro n'est pas bon s'il ne met pas la tête au raz du sol en faisant l'avion. C'est devenu quasiment le seul critère d'excellence. 
   Les deux qui ont offert des facilités échurent entre les mains d'Alejandro Talavante qui sut en profiter. L'Extremeño semble être dans un moment heureux. Détendu, souriant, faisant preuve d'un répertoire varié, tueur sûr, il se montra torero tout au long de la soirée, coupa trois oreilles et sortit a hombros de Vista Alegre. Mais il faut relativiser ce triomphe car le sixième domecq, d'excellente bravoure et noblesse était aussi le plus faible de l'envoi et il ne permit pas au maestro de donner la faena profonde que les aficionados attendaient et qu'il semblait en capacité de donner.
   Morante connut une journée noire. Rien à son premier toro : bronca. Dès sa sortie le second le serre, Morante se précipite vers la barrière, la franchit difficilement, aidé par le toro et retombe violemment sur le ciment de la contrepiste. On craint le pire mais le maestro se relève. Il tentera malgré tout de donner faena à ce toro avisé lorsque, des gradins, fuse une insulte. Le maestro de la Puebla va aussitôt chercher l'épée de verdad  et, sous la bronca, en finit avec le toro sans autre forme de procès. Le public de Bilbao n'a jamais brillé par sa subtilité ni par ses compétences, de ce point de vue les temps ne changent pas.

(à suivre)


samedi 19 août 2023

Retour en photos sur la novillada de Yonnet à Roquefort

 
Le terrible premier novillo (arrivé quelques heures avant la novillada pour remplacer un novillo blessé par ses congénères) a jeté l'effroi dans la piste.
 



 
 
 
 
José Antonio Valencia montra envie et métier face à ses deux adversaires.

 

 

 

 Il y eut un autre torero dans l'arène : Mathieu Guillon

 

 

 

José Rojo n'a pas démérité avec les tissus mais il arma le scandale avec les aciers.


Merci à Laurent Bernède pour ses photos.
(On peut cliquer dessus pour les agrandir)



mercredi 16 août 2023

Psychose

 

 
   Ce fut une longue soirée : trois heures de combat entre des toros et des hommes. Où l'on fut pris en permanence entre deux émotions : la tension et l'intérêt suscités par une lutte sans merci qui constitue le fondement de la corrida, la tristesse, voire le dégoût devant le mauvais vouloir ou l'incapacité de certains des acteurs bipèdes.
   Par son réel danger, le premier novillo donna le ton de la course. Un animal puissant, astifino, manso refusant les piques puis se réfugiant au toril et surtout, sautant à la gorge de qui l'approchait, et ce dès la première passe de cape. La panique des gens à pied ne fit qu'aggraver le problème mais elle était justifiée et compréhensible en raison de la dangerosité extrême de la bête. Dès lors un climat de psychose s'instaura qui transforma les plus médiocres des acteurs (et il y en avait beaucoup en ce dimanche 13 août sur le sable de Roquefort) en marionnettes totalement inhibées et incapables du moindre geste taurin.
   Le problème c'est qu'il restait cinq Yonnet à tuer. Tous magnifiques, puissants, braves ou mansos con casta, mais dont aucun ne possédait le caractère assassin du premier. Un lot de grand intérêt qui en d'autres circonstances et avec d'autres lidias aurait pu se révéler meilleur encore. 
   Difficile moment pour les corridas toristes, trop souvent condamnées a être lidiées par des incompétents par le fait que les meilleurs toreros (y compris dans le rang des novilleros) refusent de les affronter.
   Il faut toutefois mettre à l'honneur ceux qui ont, ce jour, accompli leur tâche avec dignité. En premier lieu José Antonio Valencia. Le Vénézuélien, d'une grande vaillance, parvint à construire deux faenas qui rencontrèrent de l'écho dans le public. La belle mort du sixième par une estocade delantera d'effet fulgurant, le toro chargeant le maestro dans un dernier élan de caste et mourant à ses pieds, lui permit de couper une oreille et de terminer la soirée dans une alegria qu'elle n'avait jusqu'alors jamais connue. Mathieu Guillon "El Monteño" en deux belles paires de banderilles (salut) montra le grand professionnel qu'il était. Enfin les piqueros accomplirent leur office plutôt correctement en 15 dures rencontres.
   Cette inconfortable après-midi de toros rappela aux vieux habitués de la Monumental des pins d'autres tardes du même acabit, fréquentes dans les années 80 et 90. On se souvient en particulier de la terrible novillada d'Infante da Camara qui, en 1983, avait créé chez les porteurs de coleta un mouvement de panique identique à celui de ce jour. Où bien les Barcial de 1996 dont le premier avait envoyé Francisco José Porras à l'hôpital, créant le même état de psychose que ce jour.
   Des après-midis d'émotion pour rappeler que la tauromachie c'est aussi cela.
 
Roquefort, dimanche 13 août 2023, six novillos de Yonnet, imposants, pour Diego Peseiro (à la dérive), José Rojo (tueur calamiteux) et José Antonio Valencia (valiente). 




photos : Laurent Bernède
  

mercredi 2 août 2023

Dimanche 13 août : le retour des Yonnet à Roquefort

 

 
   En 2005 et 2006, les novillos de Yonnet ont déjà foulé le sable roquefortois avec succès. On se souvient notamment de Cassaïre, grand novillo honoré d'un tour de piste en 2005 (voir ici). 
   Auparavant, au début des années 90, Hubert Yonnet avait été un temps organisateur apprécié de la novillada des fêtes.
   On attend  avec intérêt le combat des novillos des héritiers de Hubert Yonnet d'autant qu'ils semblent actuellement dans un bon moment.
 

   
   
   Le matin, le cartel de la novillada non piquée ne manque pas lui non plus d'intérêt avec variété d'encaste (Atanasio chez Malabat, Santa Coloma chez Turquay et Domecq pour Le Lartet et Alma Serena) mais aussi la présence de Javier Zulueta qui a récemment enflammé par son art le public de la Maestranza. (PS : On apprend que le Sevillan Javier Zulueta s'est désisté et sera remplacé par le Péruvien Pedro Luis.)