lundi 31 juillet 2023

Croquis de la fête taurine (poèmes 6)

 
Miura
 
Aujourd'hui tout est différent
L'attente
Les gestes
Vous êtes là mythiques Miura 



Fraile

Ah !
La caste
des Fraile
pour le bonheur d'une arène en ébullition
en ces dimanches d'août  à Bayonne



Pablo Romero
 
Beaux pâles héros morts
sortis
du moule
de la chimère et de la perfection 
 







mardi 25 juillet 2023

Mont-de-Marsan 2023 (suite)

 Samedi 22 juillet
Toros de La Quinta (vuelta au cinquième Corchaito) pour Daniel Luque (une oreille, une oreille), Emilio de Justo (silence, deux oreilles) et Clemente (silence, une oreille)
 
Points positifs : 
   - Après son bajonazo de jeudi, Daniel Luque nous devait une estocade, elle vint au quatrième : estoconazo, mort instantanée du toro et oreille.
   - Face au cinquième, un toro en or, l'entrega ou plutôt le survoltage d'Emilio de Justo, depuis la puerta gayola jusqu'à l'estocade contraire finale lui a valu un chaleureux triomphe.
   - La révélation Clemente
Lorsque sort le sixième La Quinta, le Bordelais sait qu'il joue son va-tout. Il débute par trois farols à genoux, le dernier extrêmement risqué dans les terrains du centre. Suivra une très grande actuation face à un très bon toro. La faena est complète, artistique, variée, le toro est dominé mais sur la tentative de recibir, le torero est pris et blessé au mollet, malgré la douleur, en boitillant, il poursuit le combat, estocade, descabello, émotion générale et grosse oreille avant départ pour l'infirmerie. Nous venons de vivre le moment le plus fort, le plus émouvant de la feria.
Beaucoup découvraient Clément Dubecq ce jour et pourtant il y a dix ans déjà il se présentait en novillada piquée à Captieux ... (voir ici)
   - La belle attitude des deux maestros qui par respect pour le compagnon blessé décident de sortir à pied plutôt qu'à hombros comme l'arithmétique taurine le leur aurait permis.

Points négatifs :
   - La présentation très déficiente de deux La Quinta (les 1 et 3), anovillados. Cela fait sept toros qui dans cette feria étaient, même s'il possédaient l'âge légal, plus proche du novillo que du toro. Sept de trop pour une arène qui est classée en première catégorie.
   - Dans la petite brochure distribuée à l'extérieur des arènes par la peña Los Pechos, le rédacteur fait la différence entre un toro docile et un toro noble. Il est écrit : "Le toro docile ou soso, est fade et candide. Il répond niaisement aux sollicitations sans jamais chercher à être dangereux. Il collabore plus qu'il ne combat." Il m'a semblé que cette définition s'appliquait parfaitement à la plupart des La Quinta du jour. On exceptera le 2, plus encasté, et le 6, le plus complet du lot.
   - La gestion de l'après-course a été calamiteuse (public captif dans les arènes et public à l'extérieur qui attendait pour pénétrer dans une plaza déjà pleine) et aurait pu avoir des conséquences graves. Tout ça pour un concert de bandas ! Sans compter la suspicion qui s'installe : s'achemine-t-on à Mont-de-Marsan vers un hold-up à la dacquoise avec corrida suivie de concert qui permet de remplir les arènes avec un cartel faiblissime et bon marché ?


Dimanche 23 juillet
Toros de Pedraza de Yeltes pour Rafaelillo (salut, vuelta), Alberto Lamelas (salut, silence) et Thomas Dufau (silence et despedida)

Points positifs :
   - Par leur présence physique, les toros de Pedraza apportent à la corrida une émotion particulière. Tout ce qui se réalise devant eux prend de l'importance. S'ils n'ont pas atteint aujourd'hui la perfection des deux précédentes années, leur bravoure mêlée à une pointe de mansedumbre a contribué à une tarde souvent vibrante et a permis quelques beaux tercios de piques. Pour moi, le lot le plus intéressant de la feria.
   - Les adieux réussis de Thomas Dufau
Un hommage officiel en début de course, un émouvant brindis à sa cuadrilla et à son équipe au sixième et pour finir une sortie a hombros de despedida sur les épaules de ses compagnons toreros ont marqué les adieux de Thomas Dufau à la plaza montoise, celle où il a le plus toréé et où il a toujours donné le meilleur de lui-même. Mais le plus important est peut-être la très bonne faena que Thomas a réussi à construire au bel et bon dernier Pedraza. Une faena au cours de laquelle il s'est senti torero et a pu montrer le très bon niveau qu'il est parvenu à atteindre après douze ans d'alternative. Et finalement l'échec à l'épée n'a été que le témoignage de ce qui, durant sa carrière, a constitué son talon d'Achille.

Points négatifs :
   - Être spécialiste des corridas dures use. Pour un Rafaelillo qui, avec un belle dose de roublardise, comme il en a fait preuve ce jour, a réussi à durer, d'autres se sont usés prématurément. Alberto Lamelas s'est trouvé aujourd'hui en grande difficulté. En particulier face au redoutable cinquième dont la caste l'a débordé à tel point qu'il a dû renoncer au combat et aller chercher l'épée.
 
 
   Bien que sans corrida complète, cette feria laissera le souvenir de nombreux moment forts. Elle connut un grand succès public auquel ne sont pas étrangers des cartels variés et bien équilibrés. On regrettera toutefois la présentation insuffisante de certains toros, en particulier lors des corridas de figures.




lundi 24 juillet 2023

Mont-de-Marsan 2023

 

 
   Chaque jour de cette feria de la Madeleine a connu d'excellents moments mais aussi des insuffisances que les aficionados se doivent de notifier car, au Moun comme ailleurs, la partie la plus festive du public se contente parfois de peu au risque de faire baisser le niveau et l'intérêt des corridas.
   Cette dichotomie justifie mon bilan en deux parties, d'une part les points positifs qui correspondent aux satisfactions, voire aux grands moments que l'on a vécus durant la feria; d'autre part les points négatifs, ceux qui contribuent à la tirer vers le bas.

Mercredi 19 juillet
Toros de Garcigrande pour Roca Rey (une oreille, une oreille), Tomas Rufo (silence, silence) et Yon Lamothe qui prenait l'alternative (silence, une oreille).

Points positifs : 
   - Le tercio de piques du cinquième qui pousse avec violence et projette le piquero dans le callejon. Un Garcigrande ! Au Plumaçon ! 
   - Faraon, sixième toro de Garcigrande, negro burraco qui remate au burladero, pousse sous deux piques, se remet sans problème d'une vuelta de campana, charge avec codicia sur les deux cornes, tête au raz du sol et résiste à la mort. Un toro brave. Pour moi, le meilleur de la feria.
   - La bonne prestation de Yon Lamothe (une oreille) face à ce même Faraon pour une alternative réussie.
 
Points négatifs :
   - La présentation déficiente de quatre des Garcigrande, anovillados.
   - La copie blanche rendue par Tomas Rufo à chacun de ses adversaires; il se montra long, ennuyeux, sans pouvoir donner une seule passe limpia. Un torero dans le bache ?


Jeudi 20 juillet
Toros d'El Pilar pour Sébastien Castella (silence, silence), Daniel Luque (deux oreilles, silence) et Dorian Canton (une oreille, silence).

Points positifs :
   - La faena de Daniel Luque au second toro, remarquable de technique, de doigté et d'élégance.
   - La révélation auprès du public montois de Dorian Canton dont le toreo d'une grande sincérité et pureté s'appuie aussi sur une volonté de fer.
 
Points négatifs :
   - La présentation du premier El Pilar, anovillado et cornicorto.
   - Le comportement des trois derniers Pilar, de charge fade, décasté.
   - L'estocade de Daniel Luque au second, un bajonazo qui aurait dû empêcher l'octroi des deux oreilles.
 
 
Vendredi 21 juillet
Toros de Cebada Gago pour Lopez Chaves (silence, silence), Fernando Robleño (silence, vuelta) et Jesus Enrique Colombo (une oreille, vuelta)
 
Points positifs :
   - La présentation des Cebada Gago, comme toujours d'une grande finesse de type et porteurs d'armures astifinas.
   - L'excellente faena de Fernando Robleño au cinquième. En trois séries de derechazos qu'il fallait déguster comme se dégustent les mets rares et précieux, le Madrilène a montré quel grand torero classique il était. J'ai bien l'impression qu'une partie du public, habituée aux passes longues et marginales ou aux tournoiements sans fin du toreo qui se pratique majoritairement aujourd'hui, n'a pas compris toute la beauté du toreo de Robleño.
   - Les estocades de Colombo auront marqué cette feria. Après la course on ne parlait que de ça dans les buvettes autour des arènes ... en cherchant à comprendre. Jesus Enrique est à revoir rien que pour ses estocades.
 
Points négatifs :
   - On ne s'appesantira pas sur la mansedumbre et la mala casta des toros de Cebada Gago, eux qui nous ont valu tant de tardes d'émotion. 
   - Les banderilles à cornes passées du Vénézuélien sont un problème. Le grand public applaudit parce que le torero donne beaucoup d'avantages au toro (qu'il n'assume pas à l'instant de la pose) mais les
aficionados sont consternés. Une solution : citer de plus près, de manière plus classique et clouer face aux cornes comme l'ont si bien fait durant cette feria Mathieu Guillon, Manolo de los Reyes, Fernando Sanchez, Perez Mota, Ivan Garcia, Victor  del Pozo (et j'en oublie sans doute).
 
 
                                          très belles véroniques aussi de Robleño à son premier cebada
 
 
à suivre...
 
 
  

mardi 18 juillet 2023

Céret (suite)

   

 
   
   Après une première expérience décevante (voir ici), la présentation irréprochable des toros de Saltillo et d'Escolar Gil ainsi que des novillos de Los Maños m'a permis, cette fois, d'apprécier la feria cérétane sous son meilleur jour. La qualité d'une feria vient essentiellement des élevages qui sont proposés et de leur présentation mais d'autres éléments peuvent rentrer en ligne de compte. J'ai également apprécié durant les deux jours passés dans la plaza catalane la chaleur du public lorsque les toreros faisaient les choses bien. Il y a aussi l'extraordinaire qualité de la Cobla Mil.lenària dont la musique possède une force émotionnelle incomparable.
   Si la présentation des toros fut un grand sujet de satisfaction, la déception est venue de leur comportement à la pique. Peu d'entre eux ont poussé de verdad sous le caparaçon, non par manque de moyens physiques mais par défaut de bravoure. Et comme de leur côté les piqueros se sont montrés d'une grande médiocrité, le bilan de la feria reste décevant de ce point de vue.
   Mais n'oublions pas que ce qui fait aussi le succès d'une feria toriste, ce sont, paradoxalement, les toreros. Si l'âge d'or de la corrida toriste dans les années 80 du siècle passé est lié aux grands moments que connurent alors les ganaderias de Victorino Martin, de Miura et de Guardiola, il est aussi redevable aux excellents toreros qui les affrontaient, à savoir Ruiz Miguel, Victor Mendes, les frères Campuzano, Luis Francisco Espla, Nimeño II pour ne citer que les principaux. C'est en ce sens que l'éclosion d'un torero comme Gomez del Pilar est une excellente nouvelle pour les corridas toristes. Sa prestation cérétane face à ses deux Escolar Gil a été d'un haut niveau, le maestro alliant entrega, dominio et pureté du toreo.
  La corrida d'Escolar Gil a généré de l'émotion en permanence par sa caste et sa dangerosité. Alvaro de la Calle en fit les frais face au premier, un toro réellement démoniaque. La plaza ne fut qu'un long cri lorsque, après l'avoir pris lors de l'estocade, le toro s'acharna sur lui alors que tous les toreros étaient venus au quite. Par bonheur, la blessure n'est pas aussi grave qu'elle aurait pu être. On souhaite revoir le Salmantin, dont la probité, à l'image de son toreo, mérite un meilleur sort. On souhaite aussi que les toros de José Escolar fassent preuve dans leur évolution d'une bravoure plus franche, aussi bien à la pique que face aux leurres. L'intérêt de la tarde a beaucoup tenu à la qualité et au sens des responsabilités des trois matadors (Alvaro de la Calle, Javier Cortes, Gomez del Pilar).
   Le dimanche matin, la novillada de Paloma Sanchez Rico de Terrones, très attendue parce que issue d'un encaste devenu rare (Gamero Civico), a été finalement intégralement remplacée par un encierro de
Los Maños. La déception des aficionados fut compensée par la bonne qualité du lot des buendias aragonais. Il y a peu à dire des novilleros si ce n'est que le portugais Diego Peseiro, bon banderillero, fut, des trois, celui qui fit preuve de plus de personnalité.
   Le succès public de la feria est encourageant pour l'avenir. Que de nombreux Céret de Toros voient encore le jour ! La fiesta le nécessite.


Céret

 


 
Samedi 15 juillet 2023               Céret (Pyrénées Orientales)
temps couvert
trois quarts d'entrée
 
Six toros de Saltillo de présentation impressionnante et de comportement varié (18 piques) pour Sanchez Vara (silence, vuelta), Damian Castaño (une oreille, silence), Maxime Solera (salut, silence).
 
La présentation majuscule du lot de toros de Saltillo dont l'effet était encore augmenté par les sorties de bolides que tous ont effectuées était de nature à effacer le pénible souvenir que m'avaient laissé les Miuras de 2017. Un lot donc à la présentation exceptionnelle, aux armures terrifiantes et au comportement varié, maintenant en permanence l'intérêt dans le ruedo.
Le déroulement de la corrida pourrait se découper en trois tiers. Une première partie avec deux toros très difficiles. Le tambour major poussa fort aux deux premières piques (ce fut le meilleur des six dans ce domaine) mais il sortit seul de la troisième. Ce fut par la suite un toro con mucho que torear comme l'on dit dans le jargon taurin. Le second, très encasté, cherchant l'homme sournoisement, fut très bien torée et dominé par Damian Castaño qui coupa une oreille après une entière delantera.
Changement total avec les deux toros suivants beaucoup plus abordables. Le troisième révélant une grande noblesse, faisant l'avion sur les deux bords, avec une charge longue et pastueña comme peuvent avoir  parfois les toros de cet encaste. Maxime Solera, qui l'avait accueilli par de belles véroniques, resta trop marginal dans son travail de muleta pour emporter l'adhésion des étagères. Il était trop tard lorsque, en fin de faena, il tenta de se centrer davantage. Le quatrième fut du même acabit mais sur une seule corne, la droite. Sanchez Vara le toréa avec temple mais à bout de bras et sur le pico en permanence. Étrange manque de confiance de la part d'un torero aussi aguerri ! En revanche, lorsqu'en fin de faena il cita pour une naturelle, le toro lui vint directement dessus et lui ouvrit la taleguilla.
Avec les deux derniers toros, la corrida se termina, hélas, dans une grande confusion. Se laissant influencer par un quarteron d'intégristes à mouchoir vert, le président crut bon de changer le cinquième toro pour une légère boiterie du train arrière qui ne l'avait pas empêché de recevoir trois piques. C'était le toro le plus impressionnant du lot et la stupéfaction et le désappointement furent grands de voir sortir à sa place un sobrero de Los Maños qui faisait par comparaison figure de liliputien. ¡ Un despropósito !
Enfin, un ciel couvert, la nuit tombante et un éclairage défectueux firent que le sixième toro fut lidié dans une pénombre désagréable pour le public et dangereuse pour les toreros.