lundi 27 août 2012

Trois jours de domecqs à Bilbao




Au programme de ces trois jours passés à Bilbao trois corridas avec des toros d'encaste domecq : Nuñez del Cuvillo, Jandilla, El Pilar. Belle occasion de faire le point sur ces élevages dans une arène où l'on peut supposer que les ganaderos présentent ce qu'ils ont de mieux.

En préambule il est nécessaire de préciser que, durant ces trois jours, le tercio de pique a été réduit à la portion congrue : 2 piques rarement, 1 pique et 1 picotazo dans la majorité des cas, 2 picotazos parfois. Les mises en suerte ont été effectuées au plus près du picador, parfois en ne respectant même pas le second cercle concentrique : on sent bien que tout est verrouillé afin que ni le toro, ni le picador ne puissent voler la vedette au matador figure.

NUNEZ DEL CUVILLO est un des meilleurs élevages de ces dernières années et l'un de ceux qui produisent le plus (plus de 100 toros lidiés chaque année). L'an dernier, ici-même, le lot s'était avéré excellent et Cacareo auquel Morante avait coupé deux oreilles est resté dans les mémoires.
Le lot de cette année est bien présenté, dans le type de l'élevage, c'est à dire avec des cornes très développées et astifinas mais léger de chair (moyenne 536 kg), de robes variées : 2 colorados, 2 castaños, 2 negros. Leur comportement est en adéquation avec leur physique : ils sont vifs, nerveux, mobiles, mais manquent de puissance et de fond. Du champagne de supermarché un peu éventé. Un lot très inférieur donc à celui de l'an dernier, qui a toutefois permis une tarde entretenida mais sans possibilité de toreo hondo.

Le lendemain les JANDILLA, propriété de Borja Domecq et maison mère de l'encaste domecq avec JPD, sont d'un type très différent. Tous noirs, bas et profonds (typés La Corte), bien armés, d'un promedio de 542 kg. Peu présents à la pique, ils font preuve d'une bonne noblesse au troisième tiers mais leur manque de fond les fait très vite aller a menos. Ce sont des toros de media-faena. Jandilla : un terroir de grand cru sur lequel on produit du beaujolais.

Jeudi voici venu le tour des toros d'El PILAR, les domecqs de Salamanca qu'élève Moisés Fraile. Lot très inégal où le minable côtoie l'excellent. Au physique, plus hauts que leurs cousins des jours précédents (promedio 549 kg). Trois negros, deux colorados, un castaño. Le premier bis est un laideron, le 4 et le 6 en revanche de grand trapío. A noter que le 4 était le toro de réserve et que, hier comme aujourd'hui, le plus beau des sept toros amenés par l'éleveur s'est retrouvé sobrero...
La corrida débute au plus mal avec un premier toro invalide et changé. Le 4 passe donc en 1, il est laid et faible. Mais trois toros vont relever le niveau ganadero : le 2 est un vrai bon toro de troisième tiers comme tout bon torero (El Juli en l'occurrence) rêve d'en toucher dans une arène aussi importante que Bilbao. Le 4 (sobrero) est un toro fort et imposant qui chasse Padilla à la sortie d'une paire de banderille et lui fait un coup de barrière. Sombrero le 6 enfin est, de loin, le meilleur toro de ces trois jours : il pousse fort et longtemps sous la première pique en mettant les reins, au troisième tiers il a une charge puissante et longue sur les deux cornes. Il meurt en brave, résistant jusqu'à son dernier souffle et est arrastré sous une grande ovation. L'encierro du jour est bien à l'image de la ganaderia : on y trouve le meilleur de ce que produit l'encaste domecq mais aussi la lie. Me reviennent en mémoire, pour le pire, l'infâme corrida de l'an dernier à Dax et, pour le meilleur, un grand toro à Zaragoza devant lequel Morante, alors en début de carrière, avait obtenu un triomphe d'anthologie.

Ivan FANDIÑO a confirmé son excellente temporada. C'est le torero à voir absolument cette année. Il fut largement supérieur à ses deux Jandilla. Son toreo a toutes les vertus : sincère, templé, lié; ses pecho sont d'anthologie et ses coups d'épée excellents. Oreille - oreille.
El JULI a été au début de l'année le dindon de la farce indécente jouée par le G10 lors de la renégociation des droits télévisuels. Il y a puisé une soif de triomphe se traduisant dans l'arène par une débauche d'énergie qui, compte tenu de ses capacités techniques, ne peut conduire qu'au triomphe. Ce fut le cas à Bilbao. Jeu varié à la cape, faenas construites à partir de séries de passes longues, templées et liées, données avec le compas très ouvert, final par culerinas suivi de julipiés traseros. Un procédé totalement maîtrisé qui permet une connection parfaite avec le public... et avec le toro. Une oreille d'un Nuñez del Cuvillo, deux oreilles d'un El Pilar.
Comme bien souvent avec MORANTE DE LA PUEBLA on dut se contenter de pinceladas de arte.
Il me semble que David MORA ne rentre plus dans le terrain du toro comme il lui est arrivé de le faire les années précédentes, que son toreo est devenu un peu plus mécanique. Conséquence logique : un moindre écho dans le public et un travail qui a tendance à s'effilocher. Une oreille toutefois d'un Jandilla.
Il y a longtemps que je n'avais pas vu El CID avec autant d'envie de toréer. Deux médiocres Jandilla ne permirent que des détails mais il m'a donné le désir de le revoir.
Alejandro TALAVANTE a été la grande déception de la feria. Sans âme, sans saveur, sans fil conducteur. Face à l'excellent Sombrero (de l'amer pour la circonstance) il ne dut qu'à sa vaillance et à une entière d'effet rapide de couper une oreille car il fut toujours en dessous du brave animal, son actuation tournant même souvent à la torchonnade.
Juan José PADILLA profita du capital sympathie que sa terrible cornada de l'an dernier lui a acquis et eut la sagesse ne pas dépasser les limites qui auraient pu le mettre en danger.

Public bienveillant et présidence normale.

Pour être complet sur cette revue des domecqs de Bilbao, le lundi les Fuente Ymbro étaient, d'après la presse, excellemment présentés et âpres et vendredi les Juan Pedro Domecq fades et sans intérêt.
 5 corridas sur 8 de même origine... Ça fait beaucoup, non?

5 commentaires:

Ludovic Pautier a dit…

"un terroir de grand cru sur lequel on produit du beaujolais."
et la Côte de Py et celles de La Molière c'est de la ñoñote ?
Et Marcel Lapierre, Richaud, Yvon Metras c'est pas du MacDomecq en cubi de banane qu'ils élèvent, c'est du Fuente Ymbro montois, du Torrestrella type Buanasuerte sévillan époque Paquirri.
ahlalala, je vois qu'il faut que je persiste dans ma tache d'éducateur des becs bordelais.
et le museo del vino à Bilbo, c'est toujours aussi bien ?
bonne rentrée m'sieur Velonero.

ludo

velonero a dit…

Cher Ludo, c'est vrai il arrive que le Morgon morgonne et c'est aussi précieux (et rare) qu'un domecq qui prend trois piques. En fait en écrivant beaujolais je pensais surtout au Beaujolais nouveau (qui est quand même plus proche du bœuf que du toro de combat).
C'est beau de se battre, à Bordeaux, pour les Moulin-à-Vent. Continue...
Hasta luego, abrazo...et bonne rentrée à toi aussi.

el Chulo a dit…

oui mais le givry ........et le poully fuissé bordel de merde et même le chablis pour les blancs, pas le givry, que pourtant j'ai tendance à bouder; les blancs!suis je assez clair?

Jose Morente a dit…

Velonero

Aunque matizaría alguna de sus apreciaciones, no puedo menos de felicitarle por su coherencia y honestidad

Gracias

velonero a dit…

Gracias, Jose, por leer mi post y por su comentario.