Les faits
Desgarbado, né en juillet 2004 dans l'élevage de Victoriano del Rio, au poids annoncé de 486 kg et sorti en sixième position, a été gracié. Le toro, d'apparence juvénile (anovillado), d'armure discrète mais astifina, avait pris une demi-pique au premier tiers (hampe relevée très vite par le picador à la demande du matador puis demande acceptée de changement de tiers). Le toro a quitté le cheval sans difficulté. Au deuxième tiers, il accourut sans problème vers les banderilleros. Il chargea ensuite sans discontinuer la muleta de Miguel Angel Perera pendant près d'un quart d'heure avec une noblesse inlassable.
Mon avis
Aucun toro n'ayant pris qu'une demi-pique n'est digne d'être indulté.
La noblesse du toro a été exceptionnelle, vive, codiciosa, sans doute favorisée par la manière de toréer de Miguel Angel Perera. Mais au-delà d'une certaine limite la noblesse confine à la niaiserie et ce qui était qualité a fini par m'apparaître défaut. Se faire berner pendant un quart d'heure sans esquisser le moindre signe de révolte ne me paraît pas symboliser la grandeur du toro de combat. C'est sans doute être brave mais dans le sens que l'on utilise pour dire de quelqu'un qu'il est bien brave, c'est à dire un peu con. De bien braves gens aussi ceux qui pendant cinq minutes d'hystérie collective ont demandé et obtenu l'indulto de Desgarbado.
La faena de Miguel Angel Perera
Par son aguante exceptionnel et l'harmonie de sa muleta (pratiquement pas d'accrochage) Miguel Angel Perera a su se mettre au diapason de la noblesse du toro. La faena a surtout valu par ses enchaînements parfois virtuoses qui ont porté le public au rouge vif. Mais dans le toreo fondamental elle est restée plus ordinaire. Le torero a parfois abusé du pico lors de ses longues séries de derechazos et il ne s'est pas éternisé avec la main gauche.
Une faena de Morante
A l'opposé et tout à fait passionnant fut ce qui s'est passé au cinquième. Sur la corne droite le toro a une charge puissante et il la termine par un violent coup de tête vers le haut, il saute même parfois carrément dans la muleta de Morante. Celui-ci se bat, insiste, se fait accrocher le tissus, visite la moitié du ruedo mais il a de précieux moments d'intense et pur toreo.
PS : à lire absolument, dans Campos y Ruedos, le texte sublime de Xavier Klein, De la piètre trivialité d'une journée historique.
5 commentaires:
j'y etais pas mais bien sur j'ai lu moultes resenas et ce torito etait un peu con ce qui de facto satis fait un public simplet pour une commision taurine basique.
tout à fair d'accord avec bruno, ce toro etait un peu "simplet" ne rien comprendre apres un quart d'heure de faena. pour moi la corrida doit être un combat et non une exhibition d'un torero sur un toro soumis et idiot.
vu sur youtube.
babOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOsa !
y un cazador de ella.
ludo
Cher ami aficionado,
Sachez tout d'abord que je vous lis (presque) aussi souvent que "camposyruedos" et "basta-ya", et avec d'autant plus de plaisir que... je partage vos points de vue!... Et donc, pour "nous" aficionados aux toros "de respect", l'indulto "à la dacquoise" est bien plus qu'une faute de goût, une aberration, un scandale, etc. Mais comment ne pas voir qu'il s'agit bien d'une question de "goût" - d'émotion, que les tenants de ce type d'indulto ne veulent surtout plus entendre parler de "fête sauvage" (la "fête du courage et des gens de coeur" chantée par Escamillo dans Carmen), mais de fête tout court, sans scorie, donc sans sang, donc sans pique et donc sans mort!... Avez-vous lu - publié sur le blog "lafetesauvage.blogspot.com" - le très beau texte écrit par Joseph PEYRE en 1950 dans Le Figaro littéraire? Tout est y dit avec 58 ans d'avance (!) de notre débat actuel, de la "sélection habile" arrivant à "produire une espèce chétive, taurillons qu'on verrait foncer aussi droit, aussi innocemment, aussi longtemps qu'il le faudrait pour permettre à l'artiste de parfaire ses arabesques", mais bête suscitant une "pitié encore pire"; et PEYRE d'ajouter : "Et je demanderais moi-même qu'on rende [cet infirme] à la paix de la marisma, aux oiseaux qui sont ses compagnons, aux eaux du fleuve d'où il est né"!... Eh bien nous y sommes : le voici donc ce toro si bien dénommé "de pitié" par PEYRE, et surtout qu'il faut bien comprendre ne plus être désormais destiné qu'à être toujours "indulté". Il me semble alors que nous aurons donc de plus en plus 2 types de toros pour 2 types de corridas: des toros "de pitié", pour jouer à faire 300 passes comme on fait 3 petits tours - avant de toujours s'en aller "indultés par pitié"; et des toros "de respect" à combattre (et non abattre comme l'a si bien écrit Francis WOLFF) et parfois "indultés par respect"... Il faudra (hélas?) nous y faire - et Dieu sait que je le regrette : la corrida sera désormais de plus en plus hermétiquement clivée - clivant de même ses aficionados respectifs...
Bein à vous, et suerte pour votre blog - Bernard GRANDCHAMP
Merci, cher Bernard Grandchamp, pour votre commentaire.
J'ai effectivement lu et apprécié le texte de Joseph Peyré sur le blog La fête sauvage.Il est hélas d'une étonnante actualité.
Le clivage dont vous parlez s'accentue années après années et un évènement comme celui de Dax en est un symptôme accablant. Je le regrette aussi et essaie de lutter...à mon modeste niveau.
Velonero
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