L' ŒIL CONTRAIRE
un regard sur les toros (y cositas mas)
mercredi 30 avril 2025
San Agustin : la feria del Aficionado (suite)
mardi 29 avril 2025
San Agustin del Guadalix
dimanche 13 avril 2025
Mont-de-Marsan les cartels de la Madeleine 2025
mardi 8 avril 2025
Novillada de Saintperdon au Plumaçon : Cid de Maria s'impose
Les torrestrellas portugais de la condessa de Sobral étaient dans l'ensemble bien roulés mais leur faiblesse endémique limita souvent le tercio de piques. Les meilleurs : le 3 très encasté, le 5 d'une belle charge sur les deux cornes.
L'alliance d'une vaillance téméraire et d'une insigne maladresse fit passer au péruvien Pedro Luis un après-midi difficile. Morenito de Aranda, son mentor, a du pain sur la planche.
lundi 7 avril 2025
La corrida de Saint-Martin-de-Crau
La corrida de Saint-Martin-de-Crau (Thierry Wagniart)
Magnifique entrée hier dans les arènes de Saint Martin de Crau. Il faut dire que le temps se prêtait à repartir aux arènes pour attaquer une nouvelle saison taurine. Le temps et les fameux Albaserrada d’Escolar Gil prévus à l’affiche. Ils ne se bousculent pas au portillon les « valientes » pour se mesurer à ce type de Toro. Les écoles taurines ne vous préparent pas affronter ce bétail… déjà il faut s’y mettre devant, posséder un mental à toute épreuve…mais pas que ! Être prêt à affronter et à supporter ce regard vif qui scrute faits et gestes. L’Escolar apprend vite ce qui rend son combat très difficile. Avec eux, pas de faena moderne, la « ligazón » se fait rare… mais on peut triompher avec ces Toros, pas souvent, mais on peut.
Alberto Lamelas, le « taxi driver » madrilène est sorti sur les épaules de ses fans après avoir été un chef de lidia remarquable, indispensable pour ce type de course. Je l’ai trouvé plus posé, plus technique que d’habitude, tout en maîtrisant les idées malsaines de ses deux « cárdenos ». L’envie est toujours présente et l’expérience des courses dures lui permet de se sortir de sacrés guêpiers. Coup de chapeau à lui.
On pourra reprocher beaucoup de choses au torero français Maxime Solera, son inexpérience, ses approximations, mais franchement, la série de naturelles profondes, pures qu’il nous a offerte aujourd’hui mérite tout le respect du monde et l’oreille qu’il a coupée. Preuve que le garçon sait toréer. Ce torero mérite plus d’opportunités dans l’avenir…dans ce créneau de corrida dure où il peut se faire une place.
À la lecture du cartel élaboré par ces passionnés du Toro de Saint Martin, la présence sur l’affiche du torero de Jerez, Cristobal Reyes, m’avait surpris, interpellé. Mais c’était surtout le mot « inquiétude » qui prédominait dans mon esprit… et à juste titre.
Hier le torero est passé à côté d’une catastrophe évidente. On aurait pu vivre un drame. Et là j’en veux un peu à son entourage et à l’organisation qui l’ont embarqué dans une galère qu’il n’avait nullement les moyens d’affronter.
Bon finalement, tout le monde rentre au bercail indemne, Escolar Gil maintient son rang ( en attendant les sorties de ses « cárdenos » à Madrid, Pamplona et Mont de Marsan ainsi qu’une novillada très attendue à Roquefort), ses Toros ne laissent pas indifférent.
Petite anecdote du jour : pour la première fois de ma vie, j’ai vu et entendu un président d’une corrida, prendre son micro à la fin de la lidia du premier toro et nous expliquer que si l’on voulait des oreilles il fallait se manifester ! Voilà ! Sur le coup je me suis pincé pour m’assurer que j’étais bien à St Martin de Crau … j’y étais bien, et d’ailleurs on y reviendra avec plaisir.
wT
jeudi 3 avril 2025
Tardes de soledad : un coup de poing à l'estomac
dimanche 30 mars 2025
Croquis de la fête taurine (poèmes 18)
samedi 15 mars 2025
Un texte de Jérôme Forsans
La corrida nous rend-elle meilleurs?
L’aspiration au changement est inhérente à notre nature humaine. Ce processus actif depuis le simple organisme unicellulaire jusqu’à nos sociétés développées a accompagné notre évolution biologique et fait le tissu de notre histoire. Nous voyons actuellement un bouleversement de cette organisation planétaire qui ressemble plus à une destruction de l’ordre établi qu’à la reconfiguration de celui-ci vers des libertés nouvelles.
La mécanique évolutionniste semble s’être enrayée et nous conduire vers une période plus sombre de notre histoire.
Sans jamais se répéter, l'histoire oscille entre des cycles de progrès et de régressions. Le siècle dernier en témoigne : l'élan émancipateur des années 60, marqué par les indépendances géopolitiques et les révolutions sociétales, contraste clairement avec la montée des intolérances et des forces destructrices des années 30. Là où le progrès rend possible la nouveauté, le nihilisme imite ce progrès par la simple rupture du cadre existant. Il est difficile de faire le bilan du 20ème siècle mais nous pouvons constater à la sortie des deux grands conflits mondiaux deux avancées portées par la science: une augmentation de l’espérance de vie et un bouleversement fertile des conceptions de notre place dans l’univers. Les arts ont accompagné ces bouleversements et ont renouvelé la capacité de l’humanité à s’imaginer elle-même. Ces progrès, s'ils ont su entraîner les foules ont souvent été initiés par de simples individus dont les noms ornent les frontons de nos académies d'arts et de sciences.
Les périodes d’obscurantismes ont été aussi annoncées par des individus qui souvent sans aucun titre ni qualité ont entraîné les foules.
Ces individus n’ont pas fait advenir de nouveaux possibles, avec leur lot inquiétant d’inconnu, mais ont réactivé une pensée archaïque en guise de changement. Là où le progrès nous donne un ailleurs dans lequel exister, l’obscurantisme mime un mouvement qui n’est qu’un défilé de vieux totems. Seuls des individus ayant abdiqué leur capacité de jugement au profit d’un collectif qu’ils se sont paresseusement choisi peuvent accepter de se leurrer ainsi. Les arts et les sciences deviennent des ennemis pour eux car ils se satisfont d’une société où le vrai et le faux n’ont pas plus de valeur que le bien et le mal.
La confusion générale les préserve de penser par eux-mêmes ou de simplement recevoir toute expérience leur rappelant leur responsabilité personnelle. Ces individus simplifiés, selon la formule de Georges Bernanos, n’aspirent qu’à se décharger d'eux-mêmes dans un collectif rassurant, aussi évidemment mortifère soit-il.
Cet abandon qui contredit la composante élémentaire de la vie nous interroge. En admettant que la corrida, forme d'art actuellement la plus menacée survive, pourra-t-on dans cette atmosphère distinguer un taureau qui consent en toute plénitude au don que lui fait le torero de celui qui se rend passivement à la main de ce dernier?
Un animal qui choisit d'entrer dans un cadre jusqu’alors inconnu avec celui qui se leurre d’exercer encore sa combativité?
Seul un spectateur qui dans sa propre existence n’aura cessé d’exercer sa douloureuse liberté pourra percevoir encore cette vérité.
La corrida comme tous les arts majeurs exigera toujours face à elle cet individu libre.
Jérôme Forsans