vendredi 23 juin 2023

Rubén Amón, La fin de la fête : citations

 

 
   "Les corridas sont devenues un art dérangeant et subversif. C'est d'ailleurs peut-être, paradoxalement, la meilleure manière de les préserver. De les libérer du lieu commun selon lequel la tauromachie serait ... conservatrice. "  (p. 141) 

   "Vox intoxique la tauromachie chaque fois qu'il la présente à ses propres fins comme une tradition celtibérique et identitaire. Savent-ils que le torero le plus important de ces dernières années est un Péruvien ? Que les arènes de Madrid sont dirigées par un brillant imprésario français, Simon Casas ? La tauromachie est méditerranéenne, transatlantique et, bien entendu, ''espagnolissime'', mais pas comme une chanson de Manolo Escobar, sinon comme un reflet culturel d'insolence et de subversion."   (p.14)
 
   "De tous les malentendus qui menacent la tauromachie, l'attaque des écologistes est sans doute le plus incompréhensible et le plus révoltant. Plus les sociétés ''occidentales'' prennent conscience de la menace environnementale, plus les toros devraient être considérés comme un modèle absolu de préservation et d'organisation des habitats naturels. (...)
   Les biotopes de dehesas et de marismas sont les exemples mêmes de la contribution bénéfique des toros à l'écologie. Tant pour des raisons quantitatives - un demi-million d'hectares occupés dans la péninsule ibérique - que pour des raisons qualitatives. Là où paissent et courent les troupeaux braves, on ne peut qu'observer la richesse des ecosystèmes et la diversité des espèces animales et végétales."   (p.183)

   La grâce serait le prétendu joker qui redonnerait à la tauromachie sa dignité, le recours par lequel nous pourrions éluder le dénouement essentiel du rite. La vie est pardonnée, si le toro est exceptionnel. C'est un point de vue qui pourrait s'avérer dangereux car, au-delà de la multiplication des grâces qui laisse entendre une interprétation toujours plus clémente du caractère exceptionnel, l'idée ouvre de plus en plus la voie à l'instauration d'un spectacle sans mort. L'exception peut risquer de devenir la règle.        (p. 136)
 
   La tauromachie ne doit pas renoncer au centre de gravité de son existence, la mort, ni transiger avec les réformes qui tenteraient de transformer la grand-messe en un phénomène plus accessible et édulcoré. Les toros ne sont ni immoraux ni malsains, bien que le débat simpliste proposé par notre société déshumanisée et ''animalisée'' tende à présenter les corridas comme des spectacles cruels et athlétiques.
   Ils serait même préférable qu'elles disparaissent totalement plutôt que de voir s'imposer des formules de spectacles hypocrites, et adaptées à la tolérance d'une société urbaine qui ne cesse de cacher la mort et de transformer ses animaux de compagnie en autant de placebos enfantins.   (p.339)
 
   Mais ne dramatisons pas. La tauromachie a tout de même franchi le seuil du XXIè siècle encore auréolée de prestige et d'avenir. Plus elle respectera ses fondements et plus elle sera authentique, moins elle aura de raisons de se sentir intimidée. Le danger viendra des accommodements, des formules édulcorées et des concessions faites à l'asepsie réclamée par une société avide de moralisation et d'interdiction.   (p. 346)
 




Photos : Velonero
              Laurent Bernède
  
 
 


1 commentaire:

christian a dit…

De lui je me suis relevé et gardé:
Les toros ne nous transportent pas à d'autres époques,ils nous soustraient des conventions contemporaines.

Ca c'est bien dit !!!