lundi 16 juillet 2012

En relisant Claude Popelin

La tauromachie, ouvrage sous forme de dictionnaire encyclopédique paru pour la première fois en 1970 et plusieurs fois réédité depuis, reste aujourd'hui encore avec Le taureau et son combat un des meilleurs bouquins d'initiation à la corrida. Outre ses qualités didactiques, il possède un charme - peut-être dû aux remarquables photos noir et blanc (toujours accompagnées d'un commentaire judicieux) - qui continue à opérer sur l'aficionado bien longtemps après la première lecture. Si la clarté de son contenu   permet aux néophytes de mieux pénétrer les arcanes sophistiqués du combat taurin, il fait preuve d'une richesse suffisante pour que des aficionados de muchas temporadas y trouvent aussi de quoi alimenter leur passion.
Voici par exemple ce que dit Claude Popelin pour le mot abrir :

[ouvrir] Le torero "ouvre" le taureau, quand il l'éloigne de la barrière; il le "ferme" [cerrar] quand il l'en rapproche. Il faut de toute nécessité "ouvrir" le taureau qui, par sa force ou sa violence de charge accule dangereusement l'homme contre la barrière. Il est non moins nécessaire de "fermer" un animal distrait ou hésitant à prendre la pique, tout comme celui qu'on se propose de banderiller ou de toréer,  en début de faena, au fil de la barrière.
 Ces déplacements de la bête s'inspirent autant de la nature de son tempérament que de l'impératif du combat. Les toreros, dans leur vocabulaire professionnel, se servent volontiers des expressions à l'extérieur [por fuera] et à l'intérieur [por dentro] pour désigner respectivement la direction du centre de l'arène ou celle de la barrière. Ils peuvent donc aussi bien dire "Sors le taureau à l'extérieur" qu' "Ouvre-le", ou  "Amène-le à l'intérieur", que "Ferme-le".

Avec ce paradoxe que, si dans une arène l'extérieur est situé vers le centre et l'intérieur vers la barrière, il s'agit exactement de l'inverse des représentations habituelles de ces mots.

On pourrait croire que face au toro innocent et décasté que certains éleveurs essaient de produire ces notions sont devenues obsolètes. Pourtant la tragique actualité nous en rappelle l'importance. Je pense à la terrible cogida que vient de subir ce grand torero qu'est El Chano, justement lauréat du prix Claude Popelin il y a une dizaine d'années. Sa présence a tant de fois illuminée les nombreuses novilladas et corridas auxquelles il a participé dans notre sud-ouest  qu'on lui souhaite de tout notre cœur de recouvrer l'usage de ses jambes. Mucho ánimo maestro.

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