Interrogé par la revue L'Histoire (n°290, septembre 2004) à propos des combats de gladiateurs à l'époque romaine, le grand historien Paul Veyne disait : "On est parfois tenté de comparer la gladiature à une corrida. Cela n'a pourtant rien à voir. Assister à une course de taureaux, c'est voir des hommes courageux prendre des risques. Voir cela nous fait battre le cœur mais nous ne souhaitons pas que ces hommes meurent. Et si cela arrive ou menace d'arriver, on pousse un hurlement de terreur.
Aucune image de corrida ne représente de torero encorné; et si c'était le cas, ce serait un scandale. Tandis que les lampes romaines, les bas-reliefs, les peintures antiques représentent toujours, avec délectation, le moment où un gladiateur était égorgé. Ceux qui assistaient aux combats de gladiateurs avaient le plaisir de voir des hommes se tuer. Et plus ils en voyaient mourir, meilleur était le spectacle."
Je me demande si l'empressement, l'opiniâtreté, voire la délectation avec lesquels a été montrée la fameuse image de la récente cornada de Julio Aparicio, y compris dans des médias taurins, n'est pas, chez nos contemporains, le signe d'un changement de mentalité.
Bien sûr l'évolution technologique, avec l'instantanéité de l'information qu'elle permet, n'y serait pas étrangère. Monde de plus en plus virtuel et aseptisé qui appelle, en contrepartie, toujours plus de mort, de sordide, de réel.
A moins qu'il ne se soit agi de donner au grand public des gages de dangerosité de l'activité taurine.
En tout état de cause, ceux qui se sont toujours repus de ce genre d'images, ce sont les anti-taurins. Ils ne peuvent réprimer leur jouissance à la vue du torero encorné; ils dévoilent ainsi, eux les bien-pensants, leur fond de culotte malpropre et révèlent leur vrai visage, celui de l'abjection et de la haine de l'humain.
2 commentaires:
Je crois que l'analyse est fausse. Pour moi de tout temps à jamais, en Espagne, les photos des cogidas, cornadas font les portadas des journaux. Tout livre sur la corrida a un chapitre "cogidas et cornadas". Par contre l'aficionado est moins "concerné".
Fondamentalement le combat de gladiateur est un combat à mort (similaire) entre un homme et un homme. Je suis sur que la corrida est sacrificielle. Je n'ai pas les références culturelles et intellectuelles pour pousser ce raisonnement à son terme. Mais c'est une conviction. Sacrifice que les jeux du cirque n'étaient pas.
FIX merci pour ton message.
Sur l'aspect sacrificiel (ou non) de la corrida Francis Wolff a écrit des choses très intéressantes dans Philosophie de la corrida.
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