samedi 23 août 2008

Trois jours à Bilbao

Venir à Bilbao, c'est l'assurance de voir les figuras devant des toros de grande présence. C'est aussi l'assurance de la déception car, plus que dans les autres plazas, on y place la barre de ses propres exigences au plus haut. C'est-à-dire au niveau de ses rêves.

Mardi : triomphe d'Enrique PONCE
S'il est une arène où il faut voir Enrique PONCE, c'est bien Bilbao. Il y a une réelle communion entre le torero et le public. Et ce d'autant que sa tauromachie émeut davantage devant les tios imposants qu'il affronte régulièrement ici. On peut voir dans le patio de cuadrillas la tête d'un Samuel Flores qu'il a tué il y a quelques années. Impressionnant!
Histrion d'EL VENTORRILLO, auquel il a coupé aujourd'hui les deux oreilles en imposait plus par son physique de méchant à l'armure veleta que par sa caste. La faena de PONCE fut celle d'un maître : rythme, élégance, variété, dominio. Avec un final genou ployé qui porta la plaza au rouge vif. Une estocade entière et le président, contrairement à ses habitudes, sortit les deux mouchoirs.
On a souvent vu à Bilbao des actuaciones de même niveau pour lesquelles seule la première oreille était accordée. Personnellement, il m'a semblé que les passages à gauche étaient un peu faibles pour mériter un tel prix. Alors j'ai essayé de trouver la raison d'une telle prodigalité du palco après des années de rigueur. J'en ai trouvé trois et je vous les livre comme elles me sont venues.
La première, c'est que, l'an dernier, Matias Gonzalez, le président a accordé deux oreilles au Cid, que tout le monde l'a félicité pour ce geste et qu'il a peut-être pris goût à la chose (il ne faudrait pas qu'il devienne addict!).
La deuxième, c'est qu'Enrique PONCE ne reviendra pas à Bilbao et que pour sa dernière feria ces deux oreilles sont un hommage à sa carrière. Mais les récentes déclarations du Valencien sur sa présence dans les ruedos l'année prochaine mettent à mal cette hypothèse.
La troisième -c'est ma préférée- est qu'indirectement, le président a voulu hacer daño à José Tomas, absent de la feria, en favorisant Enrique PONCE, torero de Bilbao qui, depuis plus de 15 ans, y affronte avec succès et sans chipoter le toro de Bilbao.
Après plusieurs vaines tentatives, j'ai enfin vu José Maria MANZANARES hijo bon. Torero de classe, muy puro. Mais ce qui lui a manqué aujourd'hui, face à deux VENTORRILLO très nobles, c'est une pointe d'engagement supplémentaire. Beau toreo mais sin chispa ce jour.

Mercredi : LA QUINTA, cruelle déception
Le plus mauvais lot que j'ai vu cette année (toutes catégories confondues). Une faiblesse déplorable, une fadeur désespérante, le tout sur un fond de noblesse imbécile. Si c'est ça l'avenir des Santa Coloma alors il ne nous reste plus que les yeux pour pleurer.
Juan José PADILLA toucha les deux moins mauvais et fut, comme il sait l'être, un bon animateur (une oreille).
EL JULI, après une prestation très décevante la veille (sifflets), se sortit l'épine du pied en inventant une faena au cinquième (une oreille).

Jeudi : MORANTE
Una tarde con MORANTE es diferente. Différente par l'attente qu'elle suscite, mélange d'angoisse et d'espérance. Chaque signe doit être observé. Le vent souffle, le toro a fait un vilain geste dans la cape du peon, c'est sûr, il ne fera rien. Mais voilà qu'il sort au quite l'air décidé, pas de doute, ce sera aujourd'hui le grand jour de MORANTE. De fait, si nous n'eûmes pas de tarde complète, nous eûmes droit à de très beaux moments, de ceux qui restent dans le souvenir. Un bon début de faena par le bas, derechazos de verdad et magnifiques naturelles. Le toro est brave, il va a mas, lance des coups de tête. La fin sera plus confuse, la mort longuette mais MORANTE DE LA PUEBLA saluera sous l'ovation.
Son second toro pousse avec bravoure sous deux piques, mais il est flageolant sur ses pattes. Le président sort le mouchoir vert alors que le toro est encore en train de pousser sous la deuxième pique. Une décision, à mon avis précipitée, qui tue la course. Car sort un sobrero infumable de Manuel Santos Alcalde. Una pena.
Sébastien CASTELLA a l'air un peu perdu dans le vaste ruedo bilbaino. Comparé à la maestria d'Enrique PONCE, il fait figure de novillero débutant.
Je crois bien, si ma mémoire ne me trahit pas, que je n'avais jamais vu de toros de NUNEZ DEL CUVILLO. Ils ne me parurent ni meilleurs ni pires que la plupart des toros d'origine Domecq que l'on voit sortir sur le sable gris de Bilbao. Deux assez bons toros, braves et qui allèrent a mas (le 2 et le 4), deux faibles de pattes qui furent changés, un mauvais toro, le premier de CASTELLA.

Quitter Bilbao est toujours difficile. Il pleut bien sûr, mais ce n'est pas la même pluie qu'à l'aller. Celle-ci a un goût d'automne, de vacances qui se terminent et de temporada sur le déclin.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci pour cette resena sincère et avisée :Enrique Ponce "bilbaino" a mis ce sacré bonhomme à une place qui lui est contestée,Morante dessine des passes comme d'autres écrivent des poèmes et Bilbao reste un fief Torista.
un saludo
bruno

Anonyme a dit…

Contrairement à beaucoup , je ne suis guère surpris du fracaso de La Quinta. Je sais que nous ne sommes pas très nombreux à partager cet avis, mais je persiste et je signe le lot de Mont de Marsan est très surcoté. Qu'avons nous vu, certes un excellent premier toro, mais à part cela des cornes explosées et suspectes, des toros poussants relativement peu et une course faussée par un président ami des toreros et de 95% des gens qui fréquent le callejon. Pour revenir à Bilbao, la composition du cartel laissait entendre ce désastre.

Ludovic Pautier a dit…

oeil contraire mais comme toujours vistoso, con brio et acéré (tiens ! un jeu de mots taurins à la noix).
allez le 1° septembre chacun de nous pensera à l'autre.
abrazo

ludo