S'annoncer seul face à six toros est une épreuve mais elle est encore plus grande lorsqu'il s'agit de six toros de Victorino Martin dont on sait que la caste laisse peu de répit à ceux qui ont l'honneur de les affronter. Il a fallu qu'Emilio de Justo fasse appel à toutes ses qualités morales et, bien sûr, taurines pour sortir grandi de ce challenge.
S'ils furent tous très intéressants au troisième tiers, générant de l'émotion et ne laissant aucune prise à l'ennui, les victorinos eurent, une fois encore après le récent scandale montois, une présentation sujette à caution. Rien à reprocher aux armures, en revanche on se demande ce que donne à manger le ganadero à ses toros pour obtenir des bichos d'un si faible volume, sans morillo ni présence physique. Cela contribue sans doute à ces tercios de piques si anodins, tels ceux de ce jour ; pour autant il ne faut pas croire que leur combat s'en trouve facilité. Vifs, répondant à chaque cite, encastés, ils constituaient un lot qui demanda en permanence les papiers à l'homme qui, seul, devait les affronter. Le grand mérite d'Emilio de Justo est d'avoir réussi à s'imposer à tous. Cette emprise il la construisit dès la réception à la cape qui fut chaque fois claire et dominatrice. A la muleta, son engagement sincère, la précision de ses toques (peu appuyés comme il se doit avec les victorinos) et la fermeté des trajets qu'il imposa malgré la pression de la charge lui permirent de résoudre les problèmes que posaient ses adversaires. Il réussit chaque fois à leur imposer des séries complètes terminées par de magnifiques pechos. Il donna la faena la plus aboutie avec le troisième, noble, montrant qu'il était capable, également, de jouer de la souplesse de ses poignets.
Mais dans cette après-midi de grande responsabilité, il dut lutter aussi avec lui-même. Il accumula en effet les échecs avec les aciers (en particulier avec les 1 et 3) à tel point que l'on put craindre à un moment que le succès lui échappe. Finalement il retrouva ses marques à l'épée avec les deux derniers pour en terminer par un estoconazo qui lui ouvrit les portes du triomphe.
Les enjeux de la tarde et la crispation liée aux échecs à l'épée l'empêchèrent sans doute, en particulier avec le 5, de libérer pleinement sa facette la plus artiste dont on sait qu'il est également pourvu.
Face aux six toros l'Extremeño se borna à un toreo classique basé sur les passes fondamentales, mais il faut reconnaitre que ce n'était pas une après-midi qui se prêtait aux fioritures.
Final heureux donc avec salida a hombros (la générosité présidentielle sur certains toros compensa les échecs à l'épée sur d'autres) pour un torero qui a montré solidité et sens des responsabilités. Un torero sur lequel on peut compter.
photo Frédéric Augé
2 commentaires:
Je partage totalement l'analyse de ce blog et suis d'ailleurs très surpris de certains commentaires parus sur la toile remettant en cause Emilio De Justo, qui a offert au public Dacquois une tarde fort plaisante ou à aucun moment l'aficionado ne s'est ennuyé. Affronter 6 toros est un excercice difficile, méritant le respect, et ce d'autant plus lorsqu'il s'agit de toros de Victorino Martin, bien que cette ganaderia soit aujourd'hui fort éloignée de celle qui a fait rêver pendant des années les aficionados a los toros.
Que se passe t'il chez Victorino ? La question mérite indiscutablement d'être posée. Si au niveau des armures, il n'y a rien à reprocher, il est difficile d'en dire autant de la présentation, puisque que ce sont 6 toros de format réduit et au trapio quasi inexistant qu'a du affronter Emilio De Justo. A la pique, le bilan est tout simplement catastrophique. La totalité du lot a juste fait l'objet de simples contacts. Et pourtant, au troisième tiers, ces toros ont, de manière fort curieuse, retrouvé toutes les caractéristiques de la ganaderia à savoir exigence obligeant celui qui les affrontait, en cette après-midi ensoleillée, à respecter les fondamentaux du torero.
Mais le grand mérite de la réussite de cette tarde revient indiscutablement à Emilio De Justo qui sut adopter le ton juste tout le long de l'après midi. Il fit preuve de sobriété présentant un torero fort classique dès la cape avec un joli poignet. Il fallait une sacrée force morale pour surmonter ses 4 premiers échecs à l'épée et sans ceux-ci, il serait reparti avec facilement 5 ou 6 oreilles (dont 2 indiscutables au troisième bicho).
Pour résumer, cette tarde, sans être inoubliable, permit à l'aficionado de passer un très agréable moment et de découvrir (c'était mon cas), un torero intéressant, méritant indiscutablement d'être revu dans la prochaine temporada.
J'aime bien ce genre de mec au regard possédé par leur afficion.
Un feu semble les dévorer.
Émilio,paco...pas des masses en fait.diego urdiales peut etre aussi.
Manolete avait se regard me semble t'il.
Un novillero que j'ai vu et oublié son nom.erreur.je le retrouverais.
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