samedi 12 avril 2014

Quand le tigre mugit

   Je suis chez mon marchand de journaux préféré, je fouine et je hume à la recherche de quelque chose à me mettre sous la dent quand j'aperçois un objet qui tranche avec les magazines habituels. Le titre d'abord, LE TIGRE, puis la photographie de couverture, ni homme politique en recherche de popularité, ni petite star des arts ou du spectacle, ni photo tape-à-l'œil d'un pays où je n'irai jamais, mais une étrange statue de dinosaure au milieu d'une montagne poussiéreuse. Et, parmi les titres qui barrent le bas de couverture : Le manque de taureaux en hiver. J'achète! ... et je n'ai pas regretté mon achat.
   Le mensuel, magnifiquement mis en page, est une revue de variétés et de curiosités. Elle mêle photographies, textes, dessins, avec pour dénominateur commun un humour décalé et iconoclaste d'inspiration oulipienne que je me risquerais à qualifier de post-situationniste.
   On trouve, par exemple, dans le numéro 39 daté du mois de mars, un étonnant portfolio de photographies de monuments péruviens par Pablo Hare (d'où le dinosaure de couverture), une convaincante analyse d'une publicité d' EDF par Adrien Absolu, un indispensable plan du métro parisien entièrement anagrammé par Gilles Esposito Farèse, un somptueux portrait de Joseph Staline intégralement réalisé en étiquettes de fruits par Chaix, une torride collection de photos extraites de fotonovelas brésiliennes des années 70 réunies par Clémentine Mélois. Et, bien sûr, le reportage d'Olivia Pierrugues sur un festival taurin hivernal dans un hameau de la commune d'Arles, dans lequel, loin des ors et lumières des ferias de catégorie, suinte le sordide d'un dimanche très ordinaire.
   Par ailleurs, le site internet de la revue confirme l'intérêt que porte Le Tigre aux aventures singulières. On peut y lire de longs entretiens avec, entre autres, un médecin sur l'île de Sein, un organisateur de safaris en Afrique, une directrice de boîte échangiste, le premier détenu innocenté de Guantanamo.
   Bref, les coups de griffe et les mugissements du tigre sont recommandables à tous ceux qui veulent tenter de sortir de l'hébètement dans lequel nous plonge trop souvent la presse mainstream.



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