mercredi 6 juillet 2011

Tiroirs



Dans les maisons il y a des meubles qui ont des tiroirs. Dans les tiroirs il y a des trésors. Parmi les trésors qu'enfant j'avais plaisir à retrouver, il y avait une série de photographies d'encierro rapportées par mon père d'une escapade à Pampelune. Et parmi ces photographies celle-ci que je ne pouvais regarder sans une pointe d'effroi. Cette petite fille sous la menace de ces cornes si acérées avait-elle survécu? Et ces gens qui semblent tous porter le deuil et que la panique fait trébucher se sauveront-ils?
Ce n'est que bien des années plus tard que je découvris, au hasard d'un article ou d'un livre, les circonstances de l'accident et l'absence de toute jeune victime.
Aujourd'hui je vois dans cette photo une métaphore de l'état de l'Espagne en juillet 1939, exsangue, à genoux, après trois années de guerre civile et la victoire sans pitié des franquistes.


Le 8 juillet 1939 Liebrero  de Sanchez Cobaleda rompt l'unique barrière de l'encierro matinal et sème la terreur parmi les spectateurs. Il épargna l'enfant mais blessa une femme avant de mourir sous les balles d'un garde civil. L'année suivante on décida d'installer une double barrière.

photo Galle

7 commentaires:

pedrito a dit…

Très émouvants, la photo comme le texte, Velonero, et ce toro qui a épargné la fillette, sûrement un signe fort du destin- d'aucun parlerait de miracle- ce qui n'a pas empêché que le toro finisse sous les balles de la guardia civil.
Mais ceux-là n'ont pas abattu que des toros échappés: pauvre Espagne populaire martyrisée par un pouvoir aux ordres de l'ordre des riches et du clergé.
Encierro 1939: j'étais à J-50 environ

xabi a dit…

Quelle photo !
J'ai des frissons dans le dos en voyant cette gamine fuir un danger tout aussi imprevisible que térifiant
Les fêtes de la San Fermin devaient certainement avoir un autre goût et une autre athmosphère mais où la passion du toro devait être elle toute aussi forte sinon plus qu'actuellement.
Merci Pierre pour ce superbe témoignage.

pedrito a dit…

Parce que Velonero,c'est Pierre ?

Cordoncillo a dit…

Impresionante, magnífico flash de la época.

Philippe Marchi a dit…

Bonjour Velonero,

Ce commentaire :
1/ pour vous remercier de publier cette extraordinaire carte postale accompagnée de ces touchantes lignes ;
2/ pour vous signaler que si l'année 1940 est parfois avancée pour dater la mise en place de la double barrière, celle de 1942 l'est également — suite à l'accident mortel du 12 juillet 1941, et
3/ enfin, pour vous demander la permission de reproduire cette carte postale sur le blog Campos y Ruedos lors d'une prochaine parution — deux jours après votre post, je publiais quelques lignes sur le vallado pamplonais sans pouvoir trancher entre 1940 et 1942...

Par avance, merci.

Bien cordialement,
Philippe M.

velonero a dit…

Bonjour Philippe Marchi
Pas de problème bien sûr pour la reproduction de cette photo.
Au dos de celle-ci est mentionné l'auteur : J. Galle - Pamplona.
Cordialement
V.

Anonyme a dit…

Merci à vous M. Velonero.

Philippe M.