lundi 2 décembre 2013

Ganaderos en difficultés (3)

   Cuadri, Adolfo Martin : prononcer ces deux noms de ganaderias suffit à vous propulser dans le gotha de l'aficion torista. Céret récupère un lot de Cuadri initialement prévu pour Bilbao et l'aficion tout entière admire l'audace des Catalans. Les Vicois annoncent des Adolfo Martin pour leur prochaine feria, les voilà réadmis par les plus grincheux  dans le giron des arènes de la plus pure tradition torista. Annoncer des Cuadri ou des Adolfo Martin sanctifie une feria. C'est là le grand succès de ces élevages dans la gestion de leur image.
   Pourtant, si l'on se risque à évaluer la prestation de leurs toros sur le sable des ruedos français et espagnols, on s'aperçoit bien vite que le compte n'y est pas tout à fait. Les deux dernières temporadas ont été des plus discrètes. Si l'on se borne à 2013, aucun lot complet n'est venu justifier le prestige des deux élevages. Certes quelques bons toros de ci de là ont permis de rappeler les potentialités de chaque fer. Je pense par exemple aux deux Cuadri de Dax dont l'un a permis un tercio de pique qui restera dans les mémoires, à un Adolfo lidié lors des Fallas qui obtint le prix du meilleur toro. C'est peu en regard des attentes de l'aficion et des nombreux toros faibles, mous et décastés qu'il lui a fallu aussi trop souvent subir.
   Ce qui me soucie dans cette morne plaine c'est que, pendant ce temps, beaucoup d'élevages dits "toreristas" ont fait de gros progrès. Ils sont parvenus à fabriquer en masse des animaux parfaitement adaptés aux objectifs de production qui leur sont assignés. Dans le meilleur des cas, lorsque s'exprime leur noblesse vive, permettre aux figures qui les toréent de triompher. Dans le pire, lorsque prédomine faiblesse et fadeur, ne gêner personne, pas même le public puisque le professionnalisme des toreros leur permet la plupart du temps de couper quelques oreilles de peu de poids ... y todos contentos.
   Mais la corrida ne doit pas se borner à cela et, si elle veut tenir toute sa place, la tauromachie du toro fort et encasté, celle où l'émotion artistique nait d'un combat authentique, nécessite des élevages sur lesquels l'aficion doit pouvoir compter pour fournir avec un minimum de régularité les toros qui  rendent cette tauromachie si passionnante. On peut donc regretter qu'à ce jour les élevages de Cuadri et d'Adolfo Martin ne soient pas parvenus à cette réussite.
   Noël approche et chacun sait qu' "aimer les toros, c'est chaque après-midi vers les cinq heures, croire au Père Noël et aller à ses rendez-vous", aussi je ne doute pas un seul instant que la temporada prochaine viendra balayer d'un vent léger toutes mes réticences ...


Toros de Cuadri de la camada 2014
Photo tirée de l'excellent site de la ganaderia

1 commentaire:

el chulo a dit…

comme toujours, tout ceci est parfaitement exact et pertinent.et aussi...........inquiétant.la mode, qu'elle s'exerce en l'un ou l'autre sens a toujours des effets dévastateurs.