dimanche 16 janvier 2011

Juan Pedro Domecq

Il faut bien l'avouer, ils sont beaux et passionnants les opus de Terres Taurines. Le dernier en date - n° 30 - consacré au Monde selon Parladé ne faillit pas à la règle.
Bien sûr, comme chaque fois, André Viard ne peut s'empêcher, chaussé de ses gros sabots, de nous fourguer à satiété de la toréabilité et de l'adéquation au marché, son credo d'homme du Mundillo qu'il partage pour l'occasion avec Juan Pedro Domecq Solis autour duquel est construit ce numéro. Reconnaissons lui toutefois le mérite d'admettre que la trop grande prévisibilité du comportement des toros d'encaste Domecq pourrait bien mener la corrida à sa perte et que seule la faculté de résistance des aficionados peut éviter le pire : "Sauront-ils faire entendre leur voix et influer sur la logique des ganaderos...?"

Juan Pedro Domecq justement, quel homme inquiétant! On le connaissait déjà pour ses propos mortifères : le toro-artiste (quel mépris pour les toreros!), la suppression des piques. Il apparaît ici enfermé dans un discours de toute puissance, de maîtrise absolue qui confine à la mégalomanie. L'utilisation du système de traitement informatique des données (intitulé Hal!) qu'il a mis au point en constitue l'aboutissement déshumanisé. Voilà une machine capable de donner à ses toros des moyennes extravagantes de toréabilité! Mais quand, sur le sable de l'arène, la réalité fait place aux fantasmes du ganadero tout s'effondre. Au point que voici deux ans, après trois tardes calamiteuses lors de la feria d'avril, les Juan Pedro ont été bannis de Séville. De fait, ce que le ganadero appelle adaptation au marché et qui lui assure une réussite commerciale indéniable c'est, je crois, l'assurance pour les figuras que ses toros, s'ils ne permettront rien de brillant ni de valeureux au moins ne les mettront pas en difficulté tant ils sont faibles et décastés.

Si l'on en croit André Viard, le ganadero serait conscient, après tant de fiascos, du manque de caste de ses produits. L'exclusion de Seville, les critiques virulentes de l'aficion et de la presse indépendante lui auraient-elles fait sentir que l'adéquation de ses toros au marché risquait de prendre du plomb dans l'aile? Toujours est-il qu'il aurait entrepris ces derniers temps un changement de cap dans la sélection afin d'augmenter la fiereza de ses toros. J'ignore ce que Juan Pedro Domecq met derrière ce beau terme de fiereza (férocité en français) mais rêvons un peu et soyons bon public, donnons lui rendez-vous dans quelques années pour voir si ses toros auront retrouvé cette fiereza qu'ils possédaient il y a un demi-siècle et qui était sans doute encore présente chez Disparate et Opiparo lidiés à Madrid lors de la dernière San Isidro...

2 commentaires:

el chulo a dit…

Je suis de ceux qui pensant que la caste existe quels que soient les encastes et que c'est surtout le mode de sélection qui en atténue la présence.

avec ce concept de "toréabilité" on a supprimé toute "lidia" en dénaturant le sens de la corrida lui même. Par exemple, voir attaquer une faena par des cambiadas me donne envie de vomir.

bravo en tous cas pour ce bel article.

Maxime a dit…

" Le plus dur avec les Domecq, c'est de les tenir debout après la pique, et de les faire avancer."