lundi 19 juin 2017

Ivan Fandiño, grand torero

   La première fois que j'ai vu toréer Ivan Fandiño c'était à Bilbao en 2006, un an après son alternative en ce même lieu. Il fut vaillant au possible et un des La Quinta du jour l'envoya à l'infirmerie. L'année suivante, la Junta Administrativa l'inclut dans un cartel de luxe. Ponce, Juli et lui, natif de la toute proche Orduña, dans le rôle du torero local et pas cher : un outsider ! Il tint son rôle à la perfection, ne ménagea pas sa peine - j'ai le souvenir d'un quite par gaonera de asusto - et coupa, face à des Ventorrillo con genio, la seule oreille du jour.
   De fait, durant toute sa carrière, Ivan Fandiño consacra son énergie, son courage, sa valeur à sortir de ce rôle d'outsider, de segundon, que le mundillo avait décidé d'assigner à ce Basque à la tauromachie brute mais d'une sincérité telle qu'elle pouvait faire de l'ombre aux figures. Et ce qui fut magnifique c'est qu'il y parvint !
   De 2011 à 2014, de sa conquête de l'Espagne et de la France jusqu'à sa grande porte madrilène, ces quatre temporadas furent pour lui des temporadas de plénitude. Son assurance, son toreo dominateur, sincère et pur (qui s'exerça face à tout type de toros), ses estocades a toda ley lui permirent d'obtenir des succès continus dans quasiment toutes les arènes où il toréa. Dans notre Sud-Ouest il devient le torero de base des principales ferias. En Espagne, il est considéré comme le triomphateur des temporadas 2012 et 2013. Ivan Fandiño est devenu un grand torero. Un moment symbolise parfaitement la réussite de l'homme et du torero : le paseo qu'il effectue, seul, dans les arènes de Madrid le 29 mars 2015. Sur son seul nom le matador basque a réussi à afficher le no hay billetes à la Monumental un dimanche de mars !
   La suite sera plus difficile. La corrida se déroule mal, le matador semble avoir perdu la confiance et la sérénité qui le faisaient dominer tous les toros. Déjà, fin 2014, on avait noté une baisse de régime après une blessure (violent choc avec perte de connaissance) survenue dans les arènes de Bayonne. Comme on pouvait s'y attendre personne ne lui fera de cadeau. Voilà le torero à nouveau marginalisé. A nouveau, il mettra toute son énergie à tenter de redevenir le Fandiño des années triomphales.
   Jusqu'à ce samedi 17 juin lorsque Provechito, toro de Baltasar Iban, délaisse la cape d'un peon pourtant parfaitement placé, pour reprendre au sol ce corps qu'il vient de renverser.
   La vie d'un torero tient parfois à très peu : un mouvement, une ombre, un coup de vent, un hasard qui se transforme en destin. C'est aussi pour cela que nous les admirons.












photo Bertrand Langlois AFP

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